« Votre majorité a ruiné l’acceptabilité d’un dispositif indispensable pour dépolluer nos agglomérations«
Monsieur le Maire,
Mesdames, Messieurs les élus,
Nous l’avons dit à plusieurs reprises, la Zone de Faibles Emissions est évidemment une nécessité pour répondre aux enjeux environnementaux, améliorer la qualité de l’air, lutter contre les polluants atmosphériques ou le réchauffement climatique.
Mais si nous prenons une nouvelle fois la parole sur ce sujet, c’est pour rappeler à quel point votre majorité a ruiné l’acceptabilité de ce dispositif, alors même qu’il s’agit d’un impondérable à sa mise en œuvre et à sa réussite. Parce que cela ne pourra pas marcher que si vous embarquez tout le monde dans le projet et malheureusement, c’est loin d’être le cas.
Tout d’abord parce que cette ZFE étendue n’a pas été coconstruite avec les communes concernées. Si vous n’impliquez pas les Maires dans le processus de déploiement, comment voulez vous qu’ils adhèrent à votre projet.
La ZFE est une obligation règlementaire certes, découlant de la législation européenne et nationale, mais il s’agit surtout d’un impératif sanitaire.
Selon la dernière étude de Santé Publique France, la pollution de l’air extérieur représente près de 10% de la mortalité dans notre pays, avec 48 000 décès prématurés annuels.
Tout l’enjeu de la ZFE consiste à concilier cet impératif sanitaire avec une justice sociale. Si les analyses démontrent que les plus modestes sont les plus touchés par la pollution atmosphérique, ils sont également ceux qui ont le plus de mal à acquérir un véhicule plus propre ou ceux qui ont le plus de difficulté à se passer d’une voiture.
Elle leur est nécessaire pour des raisons professionnelles ou tout simplement parce qu’ils habitent trop loin des transports en commun.
C’est là que le bat blesse car force est de constater que vos majorités NUPES échouent jusqu’à présent à limiter les conséquences sociales de la ZFE.
Les aides pour changer de véhicule sont ainsi insuffisantes. Alors que les subventions de la Métropole de Rouen ou celles du Grand Paris vont jusqu’à 5000 ou 6000 €, le Grand Lyon plafonne à 2000 € tandis que la Ville de Lyon a refusé de prendre sa part. Pour mémoire, nous vous avions proposé un amendement dans ce sens que vous aviez malheureusement rejeté.
En parallèle, rien n’est fait pour développer l’offre de transports en commun à forte capacité d’embarquement et ainsi inciter la population à abandonner son véhicule : vous avez compris, où je voulais en venir, pas de projet métro sur ce mandat.
Je poursuis en rappelant que le calendrier de la ZFE a été inutilement accéléré même si je reconnais qu’après des mois de batailles politiques, l’exécutif Métropolitain s’est légèrement assoupli sur ce point.
Pour autant, je vous demande quel est l’intérêt d’une telle accélération quand le parc à renouveler est important mais surtout quand, de votre propre aveu, les moyens de contrôle de la bonne application de la règlementation ZFE sont faibles ? Je pense notamment ici aux radars qui arriveront au mieux en 2025 à Lyon.
Je note d’ailleurs à ce titre votre habituelle tendance à abandonner vos responsabilités en racontant à qui veut l’entendre que l’Etat vous charge de mettre en place la ZFE sans vous donner les moyens adéquats.
La Loi d’Orientation des Mobilités de 2019 et le complément apporté par la Loi Climat et Résilience de 2021 rendent effectivement obligatoire la création de ZFE dans les collectivités au-dessus des normes d’émission et celles de plus de 150 000 habitants.
En revanche, les collectivités ont une grande latitude pour définir les modalités d’application de ces ZFE. C’est d’ailleurs pour cette raison que vous avez pu accélérer le calendrier. Il vous faut dès lors assumer ce qui relève bel et bien de votre responsabilité.
Mais si vous aviez pris le temps de bien faire les choses, vous auriez pu engager avec l’Etat une véritable discussion sur les moyens de contrôle de la bonne application de la ZFE. Vos majorités auraient pu, par exemple, discuter avec l’Etat sur une redéfinition des missions de la police de l’environnement, qui existe en France, pour lui permettre ainsi d’aider les polices municipales et nationales dans cette tâche.
Malheureusement, vous avez préféré créer un dispositif ultra-complexe, bourré de dérogations multiples, qui rend illisible et incompréhensible votre ZFE.
Pour preuve du manque cruel d’informations parmi les Lyonnais et les Grands Lyonnais, je prends le nombre de subventions d’aide à l’acquisition de véhicules propres accordées par le conseil métropolitain : 10 …
10 subventions seulement.
C’est la raison pour laquelle, nous vous demandons d’informer clairement chaque Lyonnais sur le dispositif déployé, ses échéances et les aides dont ils peuvent bénéficier.
Nous vous demandons également de défendre une dérogation d’amortissement, aussi bien écologique qu’économique, pour les véhicules Crit’air 2, afin de ne pas engendrer une obsolescence règlementaire de véhicules récents non amorti.
Sans évolution de votre part sur ces points, vous comprendrez donc facilement que nous nous abstiendrons sur ce dossier.
Je vous remercie.
Intervention de Yann CUCHERAT au conseil municipal de la Ville de Lyon du 15 décembre 2022.
Rapport n°2022/2190