Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les élus,

Alors que nous avons basculé dans la seconde moitié du mandat, nous continuons de nous interroger une fois de plus sur vos méthodes et celles de votre exécutif. Ces méthodes, que nous dénonçons depuis maintenant trois ans sans que cela ne vous fasse changer d’un iota, ne sont pas adaptées aux enjeux auxquels nous devons faire face collectivement, et dans un esprit d’intérêt général, qui vous fait si cruellement défaut. En effet, c’est de nouveau par la presse que nous découvrons l’annonce de projets structurants pour notre territoire, ce qui nous oblige à nous exprimer  en intervention préalable.

Après le déploiement des voies lyonnaises, l’apaisement de la Presqu’île qui, nous en avons bien peur, n’en sera pas un et les incohérences de la ZFE, que nous ne manquerons pas d’évoquer tout à l’heure, nous voilà confrontés à votre projet de requalification de la rive droite du Rhône qui n’a – encore une fois- pas été exempté de votre manière singulière de faire vivre la démocratie locale.

Ce projet de requalification de la Rive droite du Rhône est bien représentatif des déboires d’une politique unilatérale au service unique de votre idéologie. Une fois de plus, une fois de trop nous, avons pris connaissance des réels tenants de ce projet dans la presse. Une fois de plus, nous demeurons subjugués par votre faculté à transformer des projets initialement souhaités par tous en source de divisions, de fractures, d’incompréhensions.

En effet, nous conviendrons tous de l’intérêt de réaménager les rives de notre fleuve – nous l’avons déjà dit et répété suffisamment – qui font battre le cœur de notre Métropole. Ces aménagements s’avèrent nécessaires au regard de l’urgence environnementale, du souhait de bénéficier d’un cadre de vie plus attrayant, de notre démarche pour réduire la place de la voiture dans notre quotidien. Par ailleurs, il s’agit d’une tendance déjà bien établie, à Lyon et ailleurs, initiée bien avant votre entrée en fonction, notamment sur l’autre Rive du Rhône. En dépit de ces considérations, vous n’avez pas pu vous empêcher de marquer ce projet de votre manière partiale de guider l’action publique.

Le projet présenté n’est pas dénué de toutes qualités. Nous pouvons en ce sens féliciter les mandataires qui ont livré une proposition urbaine et paysagère de qualité et attrayante alliant végétalisation, amélioration du cadre de vie et mise en valeur patrimoniale. La qualité de ces projections tranche largement avec les carences en terme de concertation, d’anticipation des impacts sur les mobilités à l’échelle de la Métropole dans son entièreté, carences qui vont sont entièrement imputables. Ces carences, nous les percevons comme un énième affront, une irresponsabilité au regard des enjeux portés par un tel projet.

Sur le processus de concertation tout d’abord. Elle a été menée durant un mois et demi, accompagnée d’une exposition de trois jours mettant en avant les projections que vous avez largement diffusées sur les réseaux sociaux. Un mois et demi donc … Cette durée nous parait ubuesque en comparaison des Projets rives gauche du Rhône et rives de Saône qui avaient été précédés de concertations d’au moins un an. Ces concertations avaient d’ailleurs été accompagnées d’une exposition de quatre mois pour l’opération visant la Saône ainsi que d’une commission générale de la Ville de Lyon. Pour la Rive gauche du Rhône, ce délai d’un an avait permis de peaufiner le projet pour accoucher de l’ambition de renaturer la zone. En termes de concertation, peu de majorités sont exemplaires, mais il faut avouer que vous vous démarquez une fois de plus par votre légèreté en la matière. Vous ambitionniez lors de votre entrée en fonction de faire de la politique autrement, nous ne pouvons en ce sens qu’acquiescer, néanmoins je doute que les habitants puissent se satisfaire de vos singularités !

Ce manque de préparation trouve également un écho par l’absence de réflexion de fond sur les mobilités. Pourtant, il s’agit là d’une inquiétude profonde des Grands lyonnais qui ont déjà pu vous l’exprimer avec force de conviction dans le cadre dudit projet d’Apaisement de la presqu’île. Pour compenser la réduction par deux du nombre de voies de circulation vous ne pouvez miser uniquement sur une évaporation spontanée, de l’ordre quasi miraculeux du trafic, ni par le développement effréné du vélo qui n’est pas adapté à tous les usages ni une hypothétiques montée en puissance des transports en commun pour laquelle nous ne disposons pour l’heure d’aucune garantie.

Concernant vos ambitions affichées en début de mandat, nous n’avons plus aucunes illusions à nous faire.  Il serait enfin temps de faire les choses avec bon sens, sérieux et professionnalisme. Les suppositions doivent laisser place à des projections sérieuses et étayées et des actions concrètes qui doivent être intégrées aux annonces et précéder toute initiation du projet. Et le minimum du minimum serait déjà de faire les études d’impacts, ce qui semble pourtant le B à BA dans un projet d’une telle envergure. 

Nous craignons des congestions supplémentaires de la Rive droite dans une agglomération déjà tristement célèbre pour ses difficultés de circulation. À terme, cette absence de substituts viables et décarbonés pour nos mobilités accompagnant les grands projets d’urbanisme risque de définitivement porter préjudice à l’attractivité de la Presqu’île et pérenniser les véhémences justifiées des riverains et commerçants. 

Encore et toujours, désespérément, vous continuez à avoir une vision stricte et fermée de chacun de vos projets d’aménagements, comme si chaque morceau de la Ville, de la presqu’ile était un ilôt indépendant et autonome de la Métropole. Sans mesurer l’impact et les conséquences de chaque projet sur le reste des autres opérations, sur le reste de la ville et de la Métropole.

Enfin, nous espérons que le chiffrage du projet ne relève pas lui aussi également de simples suppositions. Vous avancez une enveloppe de 100 millions d’euros. Si on se fie aux aménagements menés sur la Rive gauche au prorata du nombre d’hectares couverts par les travaux, ce budget devrait quasiment être multiplié par deux. Il serait regrettable qu’il s’agisse encore une fois d’une sous-évaluation témoignant de promesses intenables supplémentaires. Vous vous êtes d’ores et déjà illustrés en la matière : mener la concertation la plus large possible, conserver des alternatives de stationnement viables notamment pour les PMR et les livreurs, ne pas congestionner la rive droite et les voies annexes… Pour chacun de ces points, vos engagements n’ont pas été tenus.

En définitive il s’agit ici d’un projet qui a fière allure quand on se fie uniquement aux projections urbanistiques, mais qui demeure une fois de plus une impasse pour les mobilités. 

Il est également un énième exemple de votre vision coercitive de l’action publique avec un déficit criant en termes de concertation et de préparation. Après 3 ans d’alertes, qui furent confirmées unes par unes, nous attendons toujours que votre exécutif prenne enfin les responsabilités qui sont les leurs. 

Nous vous suggérons de prendre rapidement toutes mesures nécessaires en ce sens. 

Pour vous dire la vérité, nous n’avons pas beaucoup d’espoir de vous voir évoluer. J’ai bien peur, M. le Président, en grand politicien et stratège électoral que vous êtes, que ce projet avec ces magnifiques images, ne soit qu’un étendard électoraliste pour 2026. Je crains que vous ne sachiez déjà que ce projet n’est pas réalisable en l’état. Mais qu’il sera pour vous, un excellent outil de communication. 

Si les architectes, urbanistes et paysagistes ont fait le job sur ce projet de requalification de la Rive droite, votre exécutif, M. Le Président, n’a pas fait le sien, sinon au doigt mouillé. Les conséquences, bien réelles, risquent fort de faire mauvais effet sur la carte postale que vous ne cessez d’agiter devant la presse. 

Je vous remercie.

Intervention de Louis PELAEZ

Conseil de la Métropole du 26 juin 2023

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