Intervention de Gérard Collomb

Je voudrais d’abord commencer mon propos en remerciant madame Henocque et la
direction des finances de nous présenter pour ce DOB un rapport qui permet, à la fois
d’avoir quelques éléments du bilan du mandat précédent et, donc de faire le point sur la
situation que nous avons laissée, de nous donner un certain nombre d’indications sur le
compte administratif 2020 anticipé et, de permettre ainsi de chiffrer le coût de la COVID


pour notre collectivité, d’apporter des indications financières sur la façon dont vous
envisagez le plan de mandat et enfin de nous présenter les premières informations quant au
budget primitif 2021. Bref de nous permettre un vrai débat d’orientation budgétaire plutôt
que de se référer à un cadre vague comme cela était le cas à la métropole pour la
présentation de la PPI.


D’abord, quelques réflexions sur le bilan du mandat précédent.
Vous me permettrez, monsieur le Maire, de vous dire que beaucoup de nouveaux exécutifs
aimeraient trouver une situation financière aussi bonne que celle que nous vous léguons.
En début de mandat, nous avions prévu une programmation des équipements pluriannuelle
à 600 millions d’euros d’investissement. Elle était prudente parce que nous devions subir à
l’époque la baisse des dotations imposée par l’Etat et de fait, alors que la Dotation globale
de fonctionnement était de 98,7 millions en 2014, elle n’atteignait plus que 62,6 millions
d’euros en 2019 soit plus de 143 millions d’euros de pertes cumulées entre 2014 et 2018
(plus d’une année de dépense d’équipement).


Pour y faire face et alors que nos dépenses d’investissement avaient atteint des sommets en
2013 et 2014, 200 millions d’euros par an, nous avons donc décidé pour le mandat 2015-
2020 d’investir 100 millions d’euros par an dans un plan que nous avons révisé en cours de
mandat en nous donnant comme objectif 630 à 650 millions avec une réalisation finale à 615
millions d’euros.


J’entends bien que vous nous dites que nous n’avons pas assez investi pour ce qui est des
équipements scolaires et de la petite enfance. Je veux simplement rappeler que dans le
mandat précédent en terme de groupes scolaires nous avons réalisé Girondins dans le 7 e ,
Simone Veil dans le 8 e que, sans la crise COVID nous aurions terminé Julien Duret toujours
dans le 8 e , Joannes Masset dans le 9 e , que nous avons aussi réalisé l’école provisoire Sergent Blandan qui est une assez belle école et que nous avons lancé Duvivier Cronstadt. 
Pour réaliser ces équipements tout en nous adaptant à la baisse des dotations et à des
prélèvements en augmentation (FPIC), à l’incertitude d’une DSU dont, comme aujourd’hui
nous ne savions pas, chaque année, si nous la percevons, nous avons mis à l’œuvre comme à
la métropole, un plan marge de manœuvre nous permettant de compenser ce
désengagement de l’Etat.


Car nous ne voulions pas – et c’est la grande différence avec ce que vous nous présent
aujourd’hui – laisser filer la dette ou baisser notre autofinancement brut.
Nous avons donc été extrêmement attentifs à nos dépenses de fonctionnement et
notamment à l’évolution de la masse salariale avec seulement 83 créations nettes de postes
sur le mandat, 57 si l’on enlève les postes nécessaires au dédoublement des classes.

Dans le même temps, les politiques suivies en matière économique pour créer des
entreprises, comme pour en attirer de nouvelles, les politiques d’urbanisme (Confluence,
Gerland, Part-Dieu mais aussi quartier de l’Industrie à Vaise, rénovation urbaine à Mermoz
nord ou à la Duchère) amenaient une augmentation de nos recettes fiscales tout comme de
nos DMTO.


L’autofinancement brut passait ainsi de 71 millions d’euros en 2014 à 109 millions d’euros en
2019 et la dette de la ville de Lyon, qui pour mémoire atteignait 428 millions en 2001 n’était
plus que de 389 millions au compte administratif 2019 soit 3,6 années de capacité de
désendettement.


 Je dois dire que la gestion financière réalisée par notre direction des finances sous la
houlette de Richard Brumm était assez exceptionnelle. Pour celles et ceux que cela
intéresse, regardez par exemple sur 2019 la gestion de la dette, avec des remboursements
d’emprunt qui vont faire baisser sa charge de la dette de 2 millions d’euros pendant 10 ans
et des emprunts avec des taux à 0,38 et à 0,39 %, capés à 1%.


Cette volonté de bonne gestion financière ne nous a pas empêchés de continuer à embellir
notre ville, de faire qu’elle soit plus équilibrée. Je rappelle par exemple qu’à Lyon, nous
sommes passés d’un taux de logements sociaux SRU de 17,72 % en 2001 à plus de 22%, alors même que nous construisions près de 50 000 logements. Et l’on se rend mieux compte
aujourd’hui, combien il faisait bon vivre à Lyon avant la pandémie et les restrictions qu’elle
entraine.


C’est grâce à cette gestion là que nous avons pu faire face à la crise de la COVID avec une
situation financière particulièrement favorable. D’abord, pour équiper nos personnels en
matière de protection individuelle – et ce ne fut pas à l’époque chose facile – pour prendre
une série de mesures en faveur de nos commerçants, de nos habitants (gratuité du
stationnement), des artisans et des professionnels du bâtiment, pour apporter une aide aux personnes âgées, aux familles les plus en difficulté, pour mettre en place des circuits courts,
pour offrir des débouchés à nos agriculteurs. Enfin pour aider très vite nos structures
culturelles qui restent encore hélas aujourd’hui terriblement frappées. Au total, comme vous
l’indiquez, c’est 40 à 45 millions qu’a coûtés la COVID à notre collectivité en 2020.
Grâce au fond de roulement d’environ 45 millions d’euros résultant de l’année 2019, nous
avons pu y faire face et il vous restera encore pour l’année 2021 quelques marges de
manœuvre, entre 20 et 30 millions d’euros. Vous voyez donc chers collègues de la majorité
que vous auriez pu hériter d’une situation financière pire que celle que nous vous avons
laissée.


Mais ce n’est pas une raison pour se laisser griser. Car  comme la cigale, vous pourriez très
vite vous trouvez fort dépourvus.


Car permettez-moi de vous dire que les perspectives que vous envisagez me semblent devoir
vous emmener, et les lyonnais avec vous, vers de grosses difficultés.
Lorsque vous procédez d’un coup, d’un seul, à la création même de 100 postes alors que, sur
tout le mandat dernier, nous n’en avions créé que 83, 57 même si l’on exclut le
dédoublement des classes, permettez-moi de vous dire que c’est une politique qui sort du
raisonnable.


Quand dans le même temps, vous ajoutez pour plus de 6 millions de mesures sociales alors
qu’avec Gérard Claisse nous avions déjà pris une série de mesures en faveur de nos agents à
la fin du mandat, qu’en 2020 nous avions décidé d’attribuer une prime COVID, on peut avoir quelques inquiétudes sur une masse salariale qui passera de  329,556 millions au compte
administratif 2019, à la somme de  347 millions que vous prévoyez pour 2021.
 
Vous voulez certes afficher votre esprit social  mais avoir l’esprit social, c’est être capable de
mener une politique efficiente sur la durée et de ne pas être obligé, au bout de quelques
temps, de prendre des mesures drastiques parce qu’on n’a pas su mener dès le départ une
politique ayant un minimum de rigueur.
Pour ce qui est des autres dépenses de fonctionnement, nous attendons de voir le Budget
primitif 2021.


Mais chacun comprend bien que lorsque vous annoncez pour ce BP des dépenses de
fonctionnement en augmentation de plus 2% par rapport au compte administratif
prévisionnel 2020, quand vous affichez des recettes à 0%, on va très vite vers le
surendettement.


Et c’est effectivement la voie sur laquelle vous êtes en train de vous engager.
Vous nous indiquez en effet que l’épargne brute qui atteignait 108,9 millions d’euros en
2019 ne serait plus que de 50 millions à la fin du mandat, soit une épargne brute divisée par
deux.


Pour ce qui est de vos ambitions, en matière d’investissement, elles sont certes moins
importantes que celles que vous affichez pour le public quand vous annoncez un chiffre
d’investissement de 1,2 milliards d’euros, parce que ce sont là des autorisations de
programme et non des crédits de paiement.


Ceux-ci se monteraient dans vos prévisions à 800 millions à comparer aux 615 que nous
avons réalisés.


Mais pour cela vous feriez passer la dette de 389 millions d’euros au CA 2019 à 640 millions,
soit 63% d’augmentation avec une capacité de désendettement qui s’élèverait à 11 ans.
Vous n’irez certes pas jusque-là parce que lorsque votre dette atteindra les 10 ans, il y a de
grandes probabilités que la préfecture prenne en main la définition du budget de la ville de
Lyon.


Encore votre estimation est-elle basée sur des prévisions de recettes optimistes.
Sur le court terme, nous sommes peut être à la veille d’un reconfinement qui pèsera encore
sur nos recettes comme sur nos dépenses.

A moyen terme, l’Etat dont la dette est aujourd’hui abyssale, cherchera des économies et
sera sans doute tenté, de mettre à contribution les collectivités locales.
Enfin, prenez garde que les politiques que vous avez décidées de mener avec la métropole,
en matière économique, d’urbanisme ou d’immobilier, ne pèsent sur nos rentrées fiscales
comme sur les DMTO


Je crains donc pour notre ville que votre optimisme d’aujourd’hui soit de courte durée et
qu’au final vous ne soyez contraint dans quelques temps de faire appel très fortement au
contribuable ( avec une hausse des taux de la taxe d’habitation qui ne serait pas prise en
compte par l’Etat) tout en étant obligé de réduire fortement vos ambitions sur le plan des
dépenses d’équipement.

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