Intervention de Yann Cucherat

Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les élus,

Cette délibération concernant les relations entre le Sytral et la ville de Lyon est l’occasion pour notre groupe d’évoquer les mobilités lyonnaises et les enjeux qu’elles décèlent. 

Depuis de nombreuses années, dans nos politiques publiques, mais également dans nos vies personnelles et actions quotidiennes, nous essayons sans cesse de changer notre rapport au monde pour lutter contre le réchauffement climatique, diminuer les pollutions ou encore préserver nos ressources. Les dégâts que provoque la main de l’homme sur la terre sont considérables et ne doivent pas être minimisés. Notre anthropocentrisme, notre consumérisme, notre matérialisme, notre soif de conquérir et de posséder à l’excès gangrènent notre planète, à n’en pas douter. Et ce qui peut paraître paradoxal, nous sommes à la fois les auteurs de cette catastrophe et en même temps les victimes. 

Mais ma conscience écologique reste humble et contrairement à vous non dogmatique. Elle s’inscrit, et je m’y efforce, dans une vision générale de la société et de notre ville. Elle intègre, à chaque fois, la capacité pour tous les Lyonnais à s’adapter aux nouvelles mesures, aux nouvelles règles que nous imposent ces préoccupations environnementales afin de ne jamais exclure une partie de la population. C’est, entre autres, ce qui nous différencie dans la manière d’appréhender les sujets, Monsieur le Maire. Mais nous avons également un autre point de divergence. 

Au-delà des changements de comportements individuels qui nous incombent, c’est aussi grâce aux innovations et aux mobilités que nous pourrons changer les choses. 

Ces dix dernières années, selon l’observatoire ATMO AURA qui mesure la pollution de l’air à Lyon, la qualité de l’air s’est sensiblement améliorée et les principaux polluants (particules fines et Oxydes d’azote) ont été divisés par deux.

Même si cela est loin d’être suffisant, ces améliorations notables sont dues à un engagement fort de l’ancienne majorité en matière de développement durable et de sobriété énergétique. Rappelez-vous ce qu’étaient les quais du Rhône avant de devenir de véritables promenades végétalisées : des parkings. Quelle ville a développé le concept du Vélo’v ? Nous menions une politique volontariste de végétalisation, d’arborisation et de développement du jardinage urbain et Lyon fut précurseur puisque c’est en 2008 qu’elle atteindra son objectif « zéro phyto », 10 années avant la norme en vigueur. En 2016, la métropole fut même la 1re collectivité de France à imposer dans son PLU un coefficient de végétalisation de 30%. Et lorsqu’en juin 2016, nous avons lancé le plan Oxygène, il s’agissait bien de lutter contre la pollution de l’air.

À travers ce plan, différentes actions ont été mises en œuvre et notamment le lancement d’une zone à faibles émissions (ZFE). 

Cette mesure a été suivie d’un accompagnement des professionnels et des artisans pour ne pas mettre en difficulté leur activité. Une tarification préférentielle a été appliquée pour certaines professions, mais aussi une aide financière pour acheter un véhicule propre adapté aux enjeux de cette ZFE.

Récemment, votre collègue Bruno Bernard a exprimé sa volonté d’élargir cette ZFE aux véhicules des particuliers et d’interdire d’ici 2025 les véhicules diesel dans la Métropole de Lyon.

Nous souhaitions vous faire part de notre vive inquiétude sur l’impact qu’une telle obligation, à si brève échéance. Comment, professionnels et particuliers, pourront-ils renouveler leur parc dans les délais annoncés ? Nul doute que ces mesures vont venir fragiliser davantage encore les personnes les plus vulnérables.

Faute de solutions alternatives suffisamment adaptées, notamment dans les territoires périphériques, bien souvent la voiture reste la seule solution pour se déplacer. Nous arriverons à diminuer efficacement la place de la voiture uniquement si nous encourageons l’intermodalité grâce à des parkings relais, si nous déployons de nouveaux services de mobilité partagée, si nous créons un RER à la lyonnaise efficace, si nous améliorons l’offre des transports en commun et notamment la création de nouvelles lignes de métro ; métro qui aurait déjà dû voir la ligne E engagée, si le travail de vos prédécesseurs était respecté…

C’est seulement avec des mesures d’accompagnement et après avoir lancé ces chantiers de transport en commun que vous auriez dû proposer l’élargissement de la ZFE aux véhicules des particuliers et à l’interdiction des véhicules diesel.  

Toujours avec cette volonté de réduire la place de la voiture en ville, nous nous sommes fortement engagés ces dernières années à favoriser la pratique des modes de déplacements doux et actifs : la marche et le vélo. 

Pour cela nous avons entrepris de nombreux aménagements à destination des piétons et des cyclistes afin de sécuriser leurs trajets et faciliter leur cheminement. Il reste encore à faire, mais toutes ces mesures ont porté leurs fruits, car, depuis 10 ans, l’usage du vélo a progressé d’environ 15% sur notre territoire. 

Je rappelle aussi que nous avons doublé le réseau cyclable depuis 2014 et nous nous rapprochons aujourd’hui d’un réseau de 300 kilomètres à Lyon intra-muros.

Si ce développement doit poursuivre sa progression, nous regrettons la façon dont vous déployez les nouvelles pistes cyclables. L’exemple dans le 6e arrondissement, déjà soulevé par son Maire Pascal Blache, d’un déploiement non concerté et inorganisé par rapport aux différents usagers de la voirie, l’illustre parfaitement. Ces pistes mal pensées, mais répondant à votre obsession, sont dangereuses et ne permettent pas aux cyclistes de prendre leur vélo en toute sécurité.  Ce n’est pas l’urbaniste Danois Mikael Colville-Andersen, la référence du vélo urbain qui dirait le contraire.

Aujourd’hui, les usagers de l’espace public (que ce soient les piétons, les vélos, les véhicules) n’y comprennent plus rien !

En ce sens, les nouveaux aménagements que vous mettez en place à la hâte, tout comme ces mesures coercitives de mobilités qui, demain, fragiliseront encore plus les personnes les plus modestes, n’augurent pas des perspectives heureuses pour les Lyonnais.

Les élus du groupe pour Lyon, qui défendent le développement équilibré de cette ville, souhaitaient vous alerter afin d’éviter que votre majorité n’attise de nouvelles tensions inutiles. 

Yann Cucherat


Conseil de la Ville de Lyon du 17 décembre 2020

Rapport n° 2020/373 : Approbation d’une nouvelle convention entre la Ville de Lyon et le SYTRAL relative aux conditions de fonctionnement et de financement des navettes locales de transport public sur le territoire de la Ville de Lyon.

Intervention de Yann Cucherat

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