À l’attention de Monsieur Bruno Bernard, Président de la Métropole de Lyon

Monsieur le Président, 

Dans la nuit du 3 au 4 juillet 1987, s’achevait le procès de Klaus Barbie à Lyon. Reconnu coupable de crimes contre l’humanité par la Cour d’Assises du Rhône, il fut condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. 

Ce procès a durablement marqué la mémoire de notre ville. Il a permis de revenir sur le Crime contre l’humanité ainsi défini par André Frossard qui a connu la prison de Montluc, enfermé dans ce que l’on a appelé la « baraque aux juifs » : « C’est tuer quelqu’un sous prétexte qu’il est né ». Élie Wiesel le rappela dans son témoignage : « Le juif fut condamné à mort parce qu’il était né juif, parce qu’il portait en lui une mémoire juive. » La rafle des enfants juifs réfugiés à Izieu le 6 avril 1944, enfermés à Montluc, et partis de la gare de Perrache pour Auschwitz dès le 7, est la quintessence de ce crime. 

À la suite de ce procès, en 1989, le maire de Lyon Michel Noir  décida de créer un musée et centre de documentation dédié à la Seconde Guerre mondiale, digne de la Ville de Lyon, ville Médaillée de la Résistance, désignée par le général de Gaulle comme « capitale de la Résistance », mais aussi capitale de la répression contre les juifs et les résistants organisée par la Gestapo et la Milice de Vichy. C’est le Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation, symboliquement aménagé dans le bâtiment qui servit de siège à la Gestapo. Son inauguration eut lieu le 15 octobre 1992, en présence de Jacques Chaban-Delmas et d’Élie Wiesel.

Un Mémorial rappelant la spécificité de la déportation des juifs comme il en existe à Paris et à Toulouse et dans de nombreuses villes d’Europe se justifie à Lyon par son histoire. Une Association « pour l’édification à Lyon d’un Mémorial de la Shoah » a été fondée et déclarée en Préfecture le 12 décembre 2018. Elle est présidée par Jean-Olivier Viout, procureur général honoraire, qui a été procureur adjoint au procès Barbie aux côtés du procureur général Pierre Truche. Un Comité de parrainage a été constitué, présidé par Maître André Soulier. L’Association et le Comité de parrainage ont été lancés officiellement le 13 septembre 2019 à l’Hôtel de Ville de Lyon. 

Le projet a le plein soutien de la Ville de Lyon et de la Région Auvergne-Rhône-Alpes. Nous ne pouvons que nous étonner du manque de soutien de la part de la Métropole. Par delà un soutien financier que nous souhaitons, la Métropole doit donner son appui à un projet prévu pour prendre place sur l’espace public, place Carnot, au pied de la gare de Perrache. Vos services ont étudié le projet, mais aucune suite concrète n’a été encore donnée. Vous n’avez pas non plus cru devoir recevoir ni Monsieur Viout, ni Maître Soulier, personnalités lyonnaises unanimement respectées. 

Notre pays est lacéré par un regain d’antisémitisme qui s’exprime désormais sans retenue, par un discours de réhabilitation du régime de Vichy et du maréchal Pétain. Plus que jamais, alors que les derniers témoins nous quittent comme récemment, Benjamin Orenstein, il nous revient de transmettre la connaissance de la Shoah. Un Mémorial comme celui qui doit être implanté place Carnot, proche de celui dédié aux Enfants d’Izieu, sera un lieu où s’inscrit l’Histoire, un lieu pédagogique permettant d’exprimer ce qu’est le crime contre l’humanité. 

L’année 2022 sera marquée par des anniversaires importants : le 80° anniversaire le 20 janvier, de la Conférence de Wansee au cours de laquelle les nazis décidèrent de mettre en œuvre un génocide systématique, réalisé méthodiquement, qui aboutit à la déportation dans des conditions atroces et à la mort de six millions de personnes juives. Elle sera marquée par les 80 ans des grandes rafles de l’été 1942, dont la rafle du Vel d’hiv à Paris. Le 19 mars ce sera le 10° anniversaire du massacre de l’école Ozar Hatorah à Toulouse, au cours duquel furent assassinés Gabriel et Arié Sandler er Myriam Monsonégo, 3, 6 et 8 ans. Ils ont rejoint les 44 enfants d’Izieu, et le million et demi d’enfants juifs disparus dans l’enfer des camps d’extermination nazis. Ces tristes anniversaires doivent nous mobiliser tous.

Monsieur le Président, nous vous demandons instamment de nous donner clairement et sans plus tarder, votre position sur le projet d’édification d’un Mémorial de la Shoah place Carnot à Lyon. 

Dans l’attente, nous vous prions de recevoir l’expression de nos meilleures salutations. 

Yann Cucherat​​, Président du Groupe Pour Lyon​

Louis Pelaez, Président du Groupe Inventer la Métropole de Demain

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