Ce conseil Métropolitain fera date, avec la présentation par l’exécutif du Programme pluriannuel d’investissements (PPI) et le premier budget de cette mandature.

Ces textes ne nous paraissant pas satisfaisant dans l’état, nous avons souhaite présenter des amendements visant à préciser la méthode et le contenu de cette PPI. Ces amendements, pourtant consensuels, ont été rejetés par la majorité.

Gérard Collomb est intervenu

Je souhaiterais pour l’avenir de notre métropole que vous puissiez en dire autant à la fin de votre mandat, avec un même niveau de réalisation et un endettement loin des 10 années que vous annoncez et qui serait une pure folie.

Intervention de Gérard Collomb

Monsieur le Président, Chers collègues,

Nous vous présenterons l’analyse que nous faisons de la PPI et du Budget primitif 2021 à 2 voix avec Nicole Sibeud. 

Il aurait semblé plus logique de commencer par l’examen de la PPI. Mais puisque vous avez souhaité présenter le BP d’abord, j’interviens en premier et Nicole Sibeud détaillera nos réflexions sur la PPI ensuite. 

Concernant cette dernière, je n’aurai que 3 remarques :

  • ce n’est pas une PPI, mais tout au plus un vague élément de cadrage. Celle de 2015 comprenait 1175 projets, dont 670 territorialisés !
  • Contrairement à celle du mandat précédent, votre PPI n’a pas été élaborée à partir des préoccupations des maires. 
  • Enfin, notre PPI n’était pas faite de vagues promesses, mais bien d’engagements réels puisque sur les 3,5 milliards annoncés plus de 3,3 ont été réalisés. 

Je souhaiterais pour l’avenir de notre métropole que vous puissiez en dire autant à la fin de votre mandat, avec un même niveau de réalisation et un endettement loin des 10 années que vous annoncez et qui serait une pure folie.

Or, permettez-moi de le dire, de ce point de vue – mais monsieur le vice-président en charge des finances le sait aussi bien que moi – je ne suis pas sûr qu’avec ce budget vous démariez sur les bonnes bases. 

En tout cas vous êtes en rupture totale avec la politique rigoureuse menée depuis la création de la Métropole. 

Si nous avons pu, en effet, avoir dans le précédent mandat un investissement aussi fort, tout en ayant un encours de dette diminuant de 315 millions, 3 années et 3 mois de capacité de désendettement, c’est que dès la première année de création de la métropole, nous avons veillé à rationaliser nos dépenses de fonctionnement, tant du point de vue des charges à caractère général que du point de vue de la masse salariale. 

Celle-ci par exemple n’a augmenté sur les budgets que j’ai pu préparer avec Richard Brumm que de 14 millions entre 2015 et 2018, alors que le Budget primitif que vous nous présentez, inscrit pour la seule années 2021, 12,8 millions de dépenses supplémentaires dans ce domaine des ressources humaines, alors même que les exercices 2020 et 2019 avaient vu la masse salariale augmenter déjà fortement, plus 15 millions pour le CA 2019. 

Dans le même temps, nous orientions nos dépenses, tant en fonctionnement qu’en investissement, vers des politiques susceptibles de renforcer la dynamique métropolitaine (création et accueil toujours plus fort d’entreprises nouvelles, grands projets urbains, mais aussi amélioration du cadre de vie), toute choses contribuant à un accroissement continue de nos recettes fiscales. 

C’est cela qui nous a permis, année après année, d’accroître notre autofinancement brut, de réduire la dette, tout en augmentant chaque année notre volume d’investissement. C’est cela qui fait la différence avec le premier budget que vous nous présentez. 

En effet, dans celui-ci les dépenses de fonctionnement augmentent de 4,6%, 3,2% pour les charges à caractère général, 3,8% pour les dépenses de personnel, 7% pour les dépenses sociales.

Dans ces dépenses, seuls deux postes sont en baisse : les reversements aux communes -2,2% et les charges financières -6%, dont la diminution est le fruit de notre gestion et dont vous bénéficiez aujourd’hui. 

Pour expliquer cette croissance des dépenses de fonctionnement, on peut bien sûr invoquer la crise et ses effets. 

Et quand l’augmentation du nombre des bénéficiaires du RSA fait grimper le montant des allocations de 43 millions, le choc est évidement rude. 

Mais je vous rappelle que nous sommes parvenus dans le précédent mandat à avoir les résultats que je vous ai présentés, en ayant eu aussi à connaître des difficultés importantes sur le plan financier : baisse des dotations avec 103 millions de pertes de recettes entre 2015 et 2018 et désensibilisation des emprunts toxiques du département qui nous a obligés à débourser 275 millions, l’État nous apportant certes une aide de 148 millions, mais étalés sur 13 ans et vous avez encore inscrit au budget 2021 un crédit de 14 millions d’euros. 

103 et 275 = 378 millions d’euros, oui c’était aussi un vrai choc ! Et malgré tout, nous sommes parvenus à le surmonter et non seulement à maintenir, mais même à accroître la dynamique métropolitaine. 

Pour ce faire, et pour pouvoir continuer à investir sans faire exploser la dette, nous avons dû mettre en place le plan marge de manœuvre qui prévoyait un examen de toutes les dépenses nouvelles, celles liées au fonctionnement de l’institution, mais aussi les participations et les subventions aux organismes extérieurs. Avec, je l’ai dit, une attention particulière à l’évolution de la masse salariale. 

Aussi, quand vous nous avez annoncé sans avoir d’objectifs précis dans votre PPI, ni avoir procédé à un audit des ressources humaines de notre maison – et croyez-moi elles sont d’une qualité exceptionnelle – que vous alliez procéder à la création de 114 équivalents temps pleins, nous sommes tombés des nues. Et ce n’est que la première année de votre mandat. Que doit-on attendre pour la suite ? 

Pour donner un élément de comparaison, lors de la première année de création de la Métropole, nous avions, nous, diminué de 18 millions d’euros les sommes initialement prévues à ce poste, cela même alors que régime indemnitaire et temps de travail n’étaient pas les mêmes entre personnels venant du département et personnels de l’ancienne Communauté urbaine. Ce qui posait quelques problèmes, ceux qui étaient présents à l’époque s’en souviennent. 

Permettez-moi donc de vous dire que la Métropole ne peut pas continuer ainsi, sauf à aller tout droit dans le mur. 

Demandez-vous par ailleurs, ce que sont les réactions de tous les chefs d’entreprises réunis ce soir pour la fête de l’entreprise organisée en visioconférence et qui n’ont, en ce moment, qu’un seul souci en tête : préserver l’emploi de leurs salariés et sauver leur entreprise. 

Que diront-ils quand ils apprendront que nous ouvrons toutes grandes les vannes de la dépense publique, non pour faire face à la crise ou pour les aider à passer ce cap, mais uniquement pour parer au fonctionnement de notre institution ?

Songez surtout que la crise sanitaire n’est pas finie, que ses répercussions économiques et sociales sont devant nous, que tous nos efforts dans ce budget devraient être tendus vers le soutien à notre environnement et non à la satisfaction de besoins que d’ailleurs vous n’avez pas encore définis. 

Pour faire face à cette crise, vous avez pourtant hérité de vrais atouts et même si vous prévoyez au budget principal des recettes à -0,6%, notre institution a une situation financière saine et notre agglomération une économie qui, en dépit des moments difficiles résiste encore aujourd’hui.

C’est ce qui vous permet d’afficher des recettes de cotisations fiscales des entreprises (CFE) à 247 millions (240 millions l’an dernier) de CVAE à 300 millions (311 prévu l’an dernier au BP), de DMTO à 360 millions (370 millions l’an dernier). Ce n’est pas l’effondrement. 

Et, comme toujours, je sais que, sauf catastrophe absolue – mais dans ce cas-là, c’est toute la donne qui change – les services ont fait des prévisions prudentes et que nous aurons de meilleurs chiffres que ceux annoncés. Il n’est que de voir ce qui s’est passé en 2020, on annonçait au BP 2020 311 millions pour la CVAE, ce sera 319 au CA ; 370 pour les DMTO ce sera 376. 

Notre première priorité devrait donc être de veiller à sauvegarder notre tissu économique, car c’est de sa préservation que dépendent toutes les politiques, sociale, environnementale, de mobilité, de logement social que vous voulez mener. 

Si je pouvais donc donner un conseil. En cette période de crise ne changez pas trop un modèle qui, en dépit des critiques que vous avez pu formuler, a fait ses preuves ! 

Pour ce qui est des DMTO par exemple, faites attention. Encadrement des loyers, préemptions massives, volonté d’imposer dans les programmes de logement une part élevée de PLAI, annonce d’une réduction des grands projets d’urbanisme, ne chargez pas trop la barque, parce que si le marché immobilier s’effondre, les DMTO qui représentent aujourd’hui 19,43% du panier des ressources fiscales de la Métropole, 13% des recettes de fonctionnement, pourraient bien diminuer drastiquement. 

Surtout, monsieur le président, mes chers collègues, ne croyez pas que le recourt massif à l’emprunt soit la recette miracle. 

Vous allez emprunter 253 millions d’euros cette années, avec une ligne de tirage de 120 millions d’euros éventuellement mobilisable. C’est énorme.

Cela peut passer pour une année où les taux d’intérêts sont bas. Mais croyez-moi ! De même qu’il existe un cercle vertueux où des dépenses de fonctionnement raisonnées, des investissements dans les secteurs porteurs de croissance (je sais que certains n’aiment pas le mot) génèrent un autofinancement brut en augmentation qui permet de se désendetter tout en ayant un plan d’investissement fort – il était de 814 millions d’euros au CA 2020 – la spirale inverse peut aussi exister : la charge de la dette pèse sur les dépenses de fonctionnement, son encours augmente, les taux sont moins favorables, l’autofinancement diminue et il faut alors à nouveau réemprunter et le cercle infernal commence alors. 

Alors je sais, Monsieur le vice-président aux finances, que vous avez tout cela en tête. Vous nous annoncez un budget « année zéro » pour le moment où vous aurez enfin finalisé votre PPI et où vous aurez préparé les esprits à mettre en place un plan marges de manœuvre dont vous nous avez dit en commission que vous l’appeliez « année zéro » parce que plan marges de manœuvre, ça fait mauvais effet. 

C’est pourtant cette politique qui nous a permis d’avoir une métropole où, avant la crise, le nombre de chômeurs et d’allocataire du RSA baissait, où le nombre de logements construits (mis à part élaboration du nouveau PLUH) augmentait, où l’investissement dans les mobilités décarbonnées progressait, améliorant la qualité de l’air, où le cadre de vie était de plus en plus agréable. 

Bref, c’était là un moyen de progresser vers ce que monsieur le Maire de Lyon appel une « politique du bonheur » et que nous souhaitons tous pour tous les habitantes et habitants de notre agglomération. Mais aujourd’hui, on le voit bien, il faudra plus que des pommiers, des pêchers, des abricotiers, des poiriers, des framboisiers, des groseilliers pour que nos concitoyens retrouvent vraiment le bonheur. 

Gérard Collomb


Conseil de la Métropole de Lyon – 25 janvier 2021

Rapport n° 2021-396 : finances, institutions, ressources et organisation territoriale – Budget primitif 2021 – Tous budgets

Intervention de Gérard Collomb

One Reply to “Budget primitif 2021 : En cette période de crise ne changez pas trop un modèle qui a fait ses preuves !”

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