En application de l’article L 3121-8 du code général des collectivités territoriales (CGCT) rendu applicable à la Métropole de Lyon par l’article L 3611-3, le Conseil de la Métropole doit établir son règlement intérieur.

Celui-ci a vocation à préciser, notamment, les modalités de fonctionnement du Conseil de la Métropole, des commissions thématiques et de la Commission permanente dans le respect des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur.

Après de vifs débats lors des 6 commissions ad hoc tenues entre septembre et octobre. Le projet de règlement intérieur est mis au vote ce lundi 14 décembre 2020.

Nous avons déjà fait part de différentes critiques à l’égard du fonctionnement de la Métropole de Lyon avec la demande, dès le premier conseil en septembre, de l’ouverture des Commissions permanentes au public et à la presse et récemment avec une lettre ouverte questionnant sur le rôle des élus métropolitains notamment dans les Conférences Territoriales des Maires.

Nos amendements au règlement intérieur

Nous demandons plus de démocratie, de transparence et une meilleure représentativité des élus. C’est dans ces objectifs que nous déposons 5 amendements :

• Sur la commission permanente :

Article 51 : Le groupe Inventer la Métropole de demain demande la levée du huis clos imposé aux commissions permanentes. Cet acte politique représente pour nous un gage de démocratie, de transparence ; mais aussi d’équité envers tous les conseillers∙ères élu∙e∙s représentant l’ensemble des citoyens de notre territoire.

C’est pour cela que nous proposons la réécriture de l’article 51 en donnant un caractère public aux séances et via l’ajout d’un article 51bis permettant, par exception au principe, la demande du huis clos par 5 membres ou par le Président.

• Sur les Conférences Territoriales des Maires (CTM)

Article 63 : Pour les élus du groupe Inventer la Métropole de demain, le fonctionnement des Conférences Territoriales des Maires (CTM) doit évoluer. Nous estimons que la présence de droit d’un membre de l’exécutif dans chaque CTM pourrait aboutir de fait à une mise sous tutelle du président∙e élu∙e par les membres de la CTM. C’est pour cette raison que nous proposons de modifier ce terme par « membre invité ».

Article 63bis : Les conseillers∙ères métropolitains sont responsables des politiques métropolitaines et redevables en cela devant les citoyens. Alors que 200 millions d’euros d’investissements métropolitains seront fléchés au niveau des CTM, il est impératif pour le respect de la transparence démocratique que les conseillers∙ères métropolitains siègent de plein droit en CTM.

Article 64 : Les travaux réalisés par les Conférences territoriales des maires (CTM) sont d’importance pour notre territoire et particulièrement pour le bassin de vie de la CTM. C’est pour cela que nous souhaitons, lorsque la demande en est faite par une CTM, que soit inscrite à l’ordre du jour, en début de séance de Conseil métropolitain, une contribution territoriale de la CTM, éventuellement suivie d’un débat.

• Article 90 sur le droit d’information des élus

Les politiques de mobilité et de l’habitat menées par le SYTRAL et la Métropole sont des axes essentiels du développement de notre territoire. Ces actions méritent un rapport annuel au même titre que les rapports légaux liés au développement durable et à l’égalité entre les femmes et les hommes.

C’est pour cela que nous demandons l’ajout de deux points de présentations préalables au débat d’orientation budgétaire :

  • Un rapport d’activité du SYTRAL sur les politiques qu’il mène en termes de mobilité ainsi que les orientations et programmes de nature à améliorer les mobilités ;
  • Un rapport sur la situation en matière de l’habitat sur le territoire de la Métropole de Lyon, les politiques qu’elle mène sur son territoire et les orientations et programmes de nature à améliorer cette situation.

Intervention de Louis Pelaez

Monsieur le Président, chers collègues,

Le vote du Règlement intérieur est un acte politique par essence. Il révèle la conception de la gouvernance de la collectivité pour les 6 années à venir et celle de la majorité qui le porte.

À ce titre, il est donc bien heureux que l’ensemble des groupes politiques puissent participer au travail autour de l’élaboration de ce règlement.

6 réunions ont été nécessaires pour aboutir au projet de document soumis au vote ce jour. 6 réunions parfois houleuses, toujours passionnées où les opinions contradictoires ont tenté de s’exprimer.

Et c’est bien là l’esprit de la démocratie. Je suis retombé sur un texte de Paul Ricœur, célèbre philosophe né dans la région, dans un de ces textes ou il parle d’éthique de la responsabilité et des conditions d’un espace public démocratique où il disait que  la démocratie suppose de « savoir reconnaître ses divisions, ses contradictions d’intérêt et de se fixer comme modalité, d’associer à parts égales, chacun dans l’expression de ces contradictions, l’analyse de ces contradictions et la mise en délibération de ces contradictions, en vue d’arriver à un arbitrage. »

De l’expression il y en a eu, de la délibération il y en a eu, de l’arbitrage il y en a eu. Mais bien trop souvent dans le sens de la majorité, qui a verrouillée la procédure.

Nous avons tout de même abouti à un certain consensus…celui qu’en l’état, ce règlement intérieur ne satisfait personne.

Beaucoup de ces critiques ne dépasseront peut-être pas le cercle feutré de ces réunions pour trouver un écho dans notre hémicycle, le fait majoritaire obligeant à une certaine discipline.

Il en résulte un document imparfait, parcellaire. Nous espérons que ce débat public va permettre de l’améliorer, en poussant chacun à prendre ses responsabilités politiques et à assumer ses choix devant la représentation métropolitaine, devant les grands lyonnais.

Ce règlement est à minima un nouvel acte manqué quant aux promesses de pratique démocratique renouvelée prêchée pendant la campagne. Combien n’avez-vous cessé durant toute la campagne électorale d’utiliser le terme de transparence, de vertu démocratique. Que de leçons sur ces thèmes, vous nous avez asséné. Mais aujourd’hui au-delà des paroles électorales, quelles avancées pour la transparence ? Quelles ouvertures en direction de l’opposition pour une gouvernance mieux partagée ?

Car en contradiction totale avec toutes les promesses de transparence,  ce projet de règlement intérieur prévoit toujours le maintien du huis-clos pour les commissions permanentes qui se dérouleront sans une grande partie des élus, sans les citoyens, sans la presse.

Cela alors même que ses compétences désormais portent sur l’ensemble des dossiers métropolitains, à l’exception des sujets budgétaires. Garde-fou garanti par la loi, rappelons-le. Preuve en est, pour ne prendre comme exemple parmi les délibérations votées lors de la dernière Commission permanente : la suppression du parking dépose minute de la gare de la part-dieu, sans aucune concertation et avec des conséquences importantes pour les habitants et les voyageurs, les délibérations d’urbanisme qui même si elles paraissent purement techniques, transforment le projet Part-Dieu avec toutes les conséquences qui vont s’en suivre etc.. etc..  

Ce propos semble d’ailleurs partagé dans l’article du Progrès paru ce week-end à propos du vote de notre Règlement Intérieur où Mme Élise Untermaier-Kerléo, universitaire en droit à Lyon 3 et spécialiste de la déontologie évoque « un manque de transparence. »

Cela, nous le répétons depuis près de 6 mois désormais.  C’est pour cela que nous proposons la réécriture de l’article 51 en rendant un caractère public aux les séances et l’ajout d’un article 51bis qui permet par exception le huis clos. 1er de nos amendement.

Nous estimons également que ce document manque d’une ambition et d’une vision politique. Qu’en cela, il propose bien peu d’avancées en se référant beaucoup à ce que fût notre communauté urbaine mais pas encore à ce que doit être notre Métropole !

Gérard COLLOMB l’a dit tout à l’heure. Le mandat 2015-2020 a été une première étape dans la création de notre collectivité, unique en son genre. Ce premier acte étant achevé, il convient désormais d’assumer une véritable ambition métropolitaine.

L’élection au suffrage universel des conseillers métropolitains nous donne cette légitimité pour agir !

Pourtant, vous ne cessez de renier cette légitimité démocratique des conseillers métropolitains en les consultant ni sur la gouvernance des Conférences Territoriales des Maires dont le périmètre se rapproche des circonscriptions métropolitaines ni sur la préparation du futur Pacte de Cohérence Métropolitain.

Cela alors même que vous comptez flécher près de 200 millions d’euros d’investissements sur le mandat auprès de ces mêmes CTM.

L’article 61 du projet de règlement intérieur dispose que « Les conseillers métropolitains de la conférence territoriale concernée avec leur collaborateur de groupe sont conviés une fois par an à une séance plénière de la conférence territoriale des maires. »

Que représente cette séance plénière qui n’est définie nulle part dans le règlement ? Pourquoi les conseillers métropolitains ne seraient-ils conviés qu’une fois par an ?  Ces questions ne trouvent aujourd’hui pas de réponse. 

C’est pour cela que nous proposons de créer un article 63 bis faisant des conseillers métropolitains des membres de droit des CTM. 2ème de nos amendements.

Situation unique en France, le suffrage universel des conseillers métropolitains est une nouvelle donne qui nous oblige à inventer une nouvelle articulation entre les communes et la Métropole, entre élus municipaux et élus métropolitains. Cela n’est ni insurmontable ni inédit : la complémentarité entre élus municipaux et les conseillers départementaux, précédant la création de la métropole, a été maintes fois démontré sans que l’un ne cherche à empiéter sur l’autre. Il est possible d’aboutir à une véritable couple maire-conseiller métropolitain. Comme il existe le couple Maire/Conseiller général, départemental aujourd’hui.

Nous disons à ceux qui pensent trouver leur intérêt, dans la mise à l’écart des conseillers métropolitains, qu’ils commettent là une erreur historique. Vouloir être l’interlocuteur unique de l’exécutif métropolitain, c’est non seulement nier la légitimité démocratique des conseillers métropolitains mais également se placer sous le joug de l’arbitraire et du bon vouloir du Président de la Métropole, sans contrepoids démocratique possible. 

Cette nouvelle légitimité démocratique des conseillers métropolitains ne peut également se concevoir sans représentation territoriale associée. Pas de démocratie sans territoire électoral. C’est parce que nous sommes élus par le peuple, sur un territoire donné qu’est la circonscription, que nous sommes directement responsables face aux citoyens et redevables des politiques métropolitaines. 

Il n’est donc pas concevable de priver les citoyens de leur représentant, leur relais et leur interlocuteur auprès de la Métropole. 

Nous pensions pourtant, au vu des déclarations de certains collègues de la majorité, qu’il s’agissait là d’un des objectifs poursuivis lors du choix d’harmoniser davantage le périmètre des circonscriptions électorales et celui des CTM ! Que s’est-il donc passé ?

Dans les textes, cette représentation en CTM est aujourd’hui assurée par l’exécutif métropolitain. Mais l’exécutif ne peut se prévaloir de représenter à lui seul, l’ensemble des citoyens métropolitains, dans leur diversité d’opinions et de sensibilité, sans s’appuyer sur la totalité des composantes de l’hémicycle ni même sans compter sur sa propre majorité !  

Nous estimons que la présence de droit d’un membre de l’exécutif dans chaque CTM pourrait aboutir de fait à une mise sous tutelle du président élu par les membres de la CTM. C’est pour cette raison que nous proposons de modifier ce terme par « membre invité ». 3ème de nos amendements

Le rôle des CTM doit également être revalorisé. Parce que les travaux réalisés par celles-ci sont d’importance pour notre territoire, nous souhaitons, lorsque la demande en est faite, que soit inscrite à l’ordre du jour, en début de séance de Conseil métropolitain, une présentation de la contribution territoriale de la CTM, éventuellement suivie d’un débat.

Enfin, parce que les politiques de mobilité et de l’habitat menées par le SYTRAL et la Métropole sont des axes essentiels du développement de notre territoire ; ces actions méritent un rapport annuel au même titre que les rapports légaux liés au développement durable et à l’égalité entre les femmes et les hommes. 

C’est pour cela que nous demandons l’ajout de deux points de présentations préalables au débat d’orientation budgétaire sur ces deux sujets. 4ème et dernier amendement.

Il n’est pas encore trop tard pour changer de cap et instaurer une véritable gouvernance démocratique, transparente, participative et juste. Nous savons que ce souhait est aussi celui de beaucoup dans la majorité métropolitaine, majorité élue sur l’aspiration à une démocratie régénérée. L’exécutif métropolitain doit maintenant entendre cette revendication.

Dans le cas contraire, cela signifierait que le nouvel exécutif choisirait de court-circuiter les instances métropolitaines et d’une mise sous tutelle des conseillers métropolitains, élus « hors-sol » et simples prête voix lors des votes métropolitains, parfois tenus même à huis-clos. 

L’intérêt métropolitain mis à terre, il serait alors plus pertinent que la Métropole redevienne un simple Établissement Public de Coopération Intercommunale.

Mes chers collègues, Madame et Messieurs les Présidents de groupe : Madame BRUNEL-VIEIRA, Messieurs BADOUARD, LONGUEVAL, MILLET, AZCUE, LEGENDRE, COCHET, GRIVEL, KIMELFELD, CHAMBON,

Ainsi qu’à tous les membres du Conseil Métropolitain,

Cautionnez-vous cette mise au ban des membres de notre assemblée ? 

Une démocratie mature doit être capable d’assumer le débat contradictoire et assurer les conditions d’un vote libre et éclairé. C’est pour cela qu’à nos côtés pour voter nos amendements, nous savons pouvoir compter sur les voix des partisans d’une métropole plus juste et démocratique.

Louis Pelaez


Conseil de la Métropole du 14 décembre 2020

Rapport n° 2020-0279 : finances, institutions, ressources et organisation territoriale – Règlement intérieur du Conseil de la Métropole de Lyon

Intervention de Louis Pelaez + Présentation de 4 amendements 

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