Monsieur le Maire,
Mesdames, Messieurs les élus,
Alors que depuis plus d’un an, la guerre fait de nouveau des ravages sur le sol européen, la commémoration du 8 mai 1945 en début de semaine a eu une résonance toute spéciale. Dans ce contexte, nous pouvons – nous devons même – tout légitimement réaffirmer notre attachement à la paix. Lyon ayant abrité des femmes et des hommes d’exception, au rôle déterminant pour un retour à la paix durant cette Seconde Guerre mondiale, je veux ici avoir une pensée toute particulière pour Elise Rivet, Simone Kadosch, Jean Moulin et Marc Bloch, mais aussi tant d’autres qui pourraient être cités.
En ce début de conseil municipal, avant d’aborder les délibérations et nos débats politiques, je tenais aussi à rendre hommage, au nom de notre groupe, à Madame Zohra FEHRAT, directrice de l’association « L’Olivier des Sages ».
Une grande dame, une Lyonnaise au grand cœur, nous a quittés. Son engagement au service des Chibanis et son action auprès des personnes les plus fragilisées doit nous inspirer et nous souhaitions avoir une pensée pour elle et ses proches.
En cette ouverture de séance, je rendrais encore deux autres hommages. Le premier à nos forces de l’ordre qui, depuis des semaines, combattent la violence extrême d’individus malveillants, fascinés par la haine et le chaos, et dont le seul but est de détruire. Par leurs actions criminelles, ils détournent les contestations et jouent un rôle malsain dans le débat national.
Le second aux manifestants et aux représentants syndicaux qui subissent ces dévoiements mais qui, en responsabilité, choisissent de ne pas se faire le relai de la violence, pour exprimer leurs désaccords et leur colère, et qui usent uniquement de leurs droits constitutionnels et républicains pour formuler leurs revendications.
La violence est un fléau qui empoisonne notre ville et notre pays depuis trop longtemps désormais : d’où qu’elle vienne, quelques puissent être ses motifs, qu’elle soit utilisée par l’ultra-gauche, l’ultra-droite, ou par des forces de l’ordre agissant en-dehors du cadre légal, la violence, sous toutes ses formes, doit être condamnée et fermement sanctionnée.
Dans notre République, dans notre démocratie, rien ne peut la rendre légitime. Les manifestations de ces dernières semaines l’ont encore démontré : des blessés graves, des boutiques ravagées, des départs de feu jusque dans nos mairies. Sans compter le coût financier des pillages et des dégradations, un coût qui met en danger des emplois voire les condamne, à l’heure où l’inflation pèse toujours autant sur la vie de nos concitoyens.
Devant cette situation grave, en tant qu’élus républicains, en tant que représentants des institutions assurant la concorde dans notre société, nous avons un devoir : celui de l’apaisement. Il n’empêchera pas les désaccords de continuer à s’exprimer. Au contraire, je crois qu’il leur permettra de mieux se faire entendre.
C’est la raison pour laquelle, en matière d’apaisement, je regrette dans cette majorité un discours trop souvent ambiguë. Je vous l’ai déjà signalé mais on ne peut pas d’un côté soutenir la désobéissance civile et de l’autre, proposer à l’Etat de créer un fonds de soutien à nos commerçants dont les locaux ont été détruits.
On ne peut pas souffler sur les braises et s’étonner ensuite qu’il y ait le feu. Je vous ai entendu condamner les violences mais malheureusement, et vous l’avez encore fait aujourd’hui, toujours a posteriori des manifestations. Monsieur le Maire, n’était-il pas de votre responsabilité d’appeler au calme en amont des manifestations, d’user de tout votre poids, pour tempérer les esprits et forcer volontairement le trait sur toutes les déclarations préventives ? Je le crois bien.
Car les violences qui se sont déroulées pendant les manifestations témoignent d’une remise en question de nos institutions républicaines. Elle est terriblement dangereuse et nous devons tous collectivement la condamner sans réserve. Monsieur le Maire, vous êtes dans cette ville le premier symbole de la République. Vous représentez ce que certains leaders politiques cherchent à déstabiliser par leurs discours insurrectionnels et ce que cherchent à détruire les individus ultra-violents de ces dernières semaines.
J’ai vu toutefois les images de votre accueil républicain au Président de la République lors de sa venue à Montluc et les sourires radieux que vous avez pu échanger. Peut-être que cela augure une nouvelle manière de fonctionner, une autre façon de collaborer, en faisant de l’intérêt de la ville et de ses habitants votre seule boussole.
Si cela avait le cas plus tôt, vous auriez ainsi pu vous éviter ce trou de 147 millions d’euros dans les finances de la ville qu’a révélé Tribune de Lyon la semaine dernière.
Nous n’avons eu de cesse de vous alerter depuis la présentation de la PPI. Vous refusiez déjà alors de faire des choix. Des arbitrages lucides, analysés, argumentés auraient été acceptés et compris par les Lyonnais. Vous n’en avez fait aucun et présenté une PPI de 1,2 milliards d’euros.
Nous vous avions prévenu que cela déboucherait sur des augmentations d’impôt et sur l’obligation d’une marche arrière. Vous avez ignoré nos alertes, vous avez maintenu votre méthode, vous avez refusé de faire des choix responsables pour vous complaire dans la démultiplication de promesses intenables. Je me souviens vous entendre dire, ici, et repris à l’unisson depuis par bon nombre de vos adjoints, qu’endetter la ville était pour vous un investissement pour les Lyonnais. J’attends la prochaine formule que vous emploierez avec vos fidèles lieutenants pour justifier ce retour en arrière.
Après avoir demandé aux habitants de cette ville de payer les frais de votre gestion imprudente en augmentant leurs impôts, il ne sera pas aisé de leur annoncez que vous ne tiendrez pas certaines de vos promesses. Ecoles, crèches, espaces culturels, équipements sportifs, résidences séniors…
Tous les secteurs risquent d’être impactés. Du reste, vous pourriez déjà nous indiquer les projets auxquels vous allez renoncer pour une meilleure clarté vis-à-vis des Lyonnais ? Car chaque projet abandonné sera une promesse non-tenue à leur égard.
Monsieur le Maire, il est plus que temps pour vous de faire preuve de transparence dans votre action publique. Que ce soit dans la gestion des deniers publics que nos concitoyens vous ont confiés ; ou dans la prévention de la violence et la condamnation de ses acteurs, vous êtes soit opaque, soit confus voire les deux à la fois.
La cérémonie en l’honneur de la police municipale que vous avez dernièrement organisée et les propos que vous y avez tenus semblent dessiner cette remise en question et ce changement de positionnement d’un Maire en campagne pour sa réélection. Vous commencez à corriger vos erreurs parce que vous percevez les dégâts causés et les risquent encourus.
Espérons simplement, qu’il ne s’agisse pas encore une fois d’une simple stratégie de communication orchestrée par vos équipes. Nous serons à notre niveau très attentifs aux actes qui en découlent.
Je vous remercie.
Intervention de Yann CUCHERAT au conseil municipal de la Ville de Lyon du 11 mai 2023.