Monsieur le Maire,
Mesdames, Messieurs les élus,
Je voudrais commencer ce propos introductif en remerciant, au nom de notre groupe, les artistes, les services et les différents agents qui ont rendu possible cette belle édition de la Fête de la Musique. Ce fut un moment de convivialité, de partage et de rassemblement dont nous avions collectivement besoin.
Nous adressons également nos remerciements à l’Orchestre national de Lyon pour cet incroyable concert tenu dans le Parc de la Tête d’Or. Cette magnifique prestation aura été un moment suspendu, réunissant toutes les générations, et je félicite chaleureusement toutes les personnes ayant contribué à ce succès qui, je l’espère, sera réitéré. Ce moment d’unité et de magie autour d’un art qu’il convient de rendre accessible au plus grand nombre, nous le devons à l’excellence lyonnaise qu’il nous faudra toujours soutenir.
Il m’est impossible en revanche de débuter notre séance sans avoir en parallèle un mot pour les victimes des tragédies qui ont émaillé l’actualité de ces dernières semaines.
La barbarie glaçante qui s’est déroulée à Annecy nous a tous plongé dans le désarroi.
Si notre émotion fût immense, elle ne doit pas nous empêcher de dénoncer l’instrumentalisation nauséabonde qui a pu être faite de l’évènement. Un tel dévoiement témoigne d’une indignité entachant la gravité du moment.
Ce détournement déplorable n’est pas sans rappeler cette pancarte placardée Square Sainte Marie Perrin dans le 3e arrondissement, dont nous condamnons le racisme non seulement abject, mais également délictuel. Je salue ici la saisie du Procureur par Mme la Préfète comme la plainte déposée par la Ville de Lyon. Face à la haine, la puissance publique doit toujours parler d’une seule voix.
Plus récemment, c’est 82 migrants qui ont péri lors d’un naufrage au large de la Grèce. Cette tragédie nous rappelle notre échec à penser et à organiser les phénomènes migratoires de notre temps.
Là où la réflexion, le débat de fond et la coordination des efforts respectifs devraient prédominer, ne règnent que les récupérations de tout bord, les invectives et l’abandon des responsabilités.
Nous vivons une époque aux défis multiples, dans une société fracturée et pétrie de tensions. La mort dramatique et inacceptable de Nahel, 17 ans, à Nanterre en apporte une preuve supplémentaire et nous sommes terrifiés par les images qui ont circulé. Nous serons par l’esprit aux côtés de ceux qui participeront à la marche blanche organisée par la famille. En tant qu’élus, nous devons cependant appeler à l’apaisement, afin de respecter la douleur des proches, permettre à la justice de faire son oeuvre et éviter que d’autres tragédies ne surviennent.
Malheureusement, au quotidien, les prêts-à-penser, nourris par le repli sur soi, l’individualisme et la violence, progressent dangereusement. Pour faire face, l’intelligence collective, le respect mutuel mais aussi la hauteur nécessaire pour apprécier les problématiques à leur juste mesure nous paraissent indispensables.
C’est la raison pour laquelle il est essentiel, Monsieur le Maire, vous qui représentez la puissance publique de notre collectivité, que vous teniez un discours sincère et que vous accordiez véritablement vos mots à vos actes. Ce n’est malheureusement que trop peu souvent le cas. Sans cela, vous ne cesserez de dégrader la confiance qu’ont nos concitoyens à l’égard de notre République.
Pour l’illustrer, vous me permettrez de vous citer :
« Je cherche avant tout à créer des situations de débat et de dialogue »
Ces propos que vous aimez tant marteler, vous les avez récemment prononcés au cours d’une longue interview accordée à BFM LYON. Dans ce même entretien, vous avez eu la possibilité de mettre vos paroles immédiatement en application lorsque le président du Comité Centre Presqu’Île vous invitait à échanger avec les associations de riverains et de commerçants au sujet de l’apaisement du centre-ville.
Vous avez néanmoins refusé l’invitation au dialogue, dont vous êtes pourtant si friands dans chacune de vos grandes déclarations.
Cette séquence pourrait être anecdotique. Sauf qu’elle résume, à elle seule, votre posture depuis le début de ce mandat : vos actes trahissent systématiquement votre discours et vos promesses. Les exemples ne manquent pas.
Vous garantissez ainsi faire tout ce qui est en votre pouvoir pour assurer la tranquillité des Lyonnais. Mais, dans le même temps, votre exécutif reste sourd aux alertes et aux propositions maintes fois répétées par les habitants, notamment ceux de la Place Mazagran. Ils continuent de vivre un véritable enfer, comme en atteste lors tout récent communiqué.
A rebours de ce qu’elle peut laisser entendre, votre majorité n’a pas daigné non plus saisir l’opportunité de la MIE sur la sécurité. C’était pourtant l’occasion de mener un bilan honnête sur un sujet de préoccupations majeures pour les Lyonnais et de produire ensemble des pistes d’amélioration. Vous avez préféré l’interpréter comme une agression politique et bâcler le dossier. Le discours ne correspond pas aux actes.
Idem lorsque vous dévoilez avec le Président de la Métropole la requalification de la Rive droite. Vous la présentez comme le fruit d’une consultation minutieuse et d’un dialogue nourri. Sauf que dans votre projet, vous refusez obstinément de traiter la première des priorités identifiées pendant la concertation ayant eu lieu fin 2021 : les mobilités ! C’était pourtant décrit comme un incontournable en long, en large et en travers dans la synthèse de ladite concertation.
Sans effort réel pour étoffer le nombre de lignes à forte capacité d’embarquement, sans parkings-relais pour diminuer la place de la voiture en ville, sans études d’impact pour préparer au mieux le déploiement du projet, et sans tenir compte de l’avis des nombreuses associations du secteur, l’apaisement de la Presqu’Île et la requalification de la Rive droite ne pourront pas atteindre les objectifs escomptés.
J’admets que votre déni en la matière ne manque pas d’audace mais il témoigne bien, là-encore, de votre réticence à vous confronter au réel.
Vous persistez donc, Monsieur le Maire, à brandir tout ce qu’en réalité vous ne ferez jamais. Les exemples sont encore nombreux, de votre politique de végétalisation largement surjouée jusqu’à votre gestion financière qui, in fine, oscille entre augmentation d’impôts et projets sur le point d’être abandonnés.
Certes, je l’admets, vous corrigez chaque jour un peu plus le tir et je félicite vos équipes de communication. Tout le monde aura remarqué que la cravate est devenue un accessoire de votre quotidien, et que vos déclarations sont plus soignées. Mais la forme est inutile, tant que les actes n’y sont pas associés.
Après 3 ans de mandat, vous ne pouvez plus reporter la faute sur vos prédécesseurs, sur l’Etat, la Région ou tout autre alibi de circonstances. Si vous n’êtes pas comptables de tous les maux, vous êtes bel et bien entièrement responsable de la trajectoire donnée à notre collectivité.
En responsabilité, vous vous devez d’accorder vos mots avec la réalité de votre action politique. Ce serait la première étape pour vous permettre d’œuvrer dans l’intérêt premier de cette ville, de respecter son histoire et d’être au service exclusif de ses habitants.
Je vous remercie.
Introduction de Yann CUCHERAT au conseil municipal de la Ville de Lyon du 29 juin 2023