Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les Conseillers,

Nous ouvrons ce débat d’orientations budgétaires 2026 dans un contexte national d’une grande fragilité institutionnelle.

Une instabilité gouvernementale persistante, un Parlement fragmenté et des débats budgétaires qui n’en finissent plus, où chaque groupe cherche sa petite victoire politicienne plutôt qu’un sursaut collectif.

Un spectacle désolant, alors même que la situation catastrophique de notre pays devrait nous appeler à la responsabilité.

Car certains semblent visiblement oublier que la France est au bord d’un gouffre financier :

Sa dette a atteint en 2025 3.416 milliards d’euros, soit 115 % du PIB.

Si cette dette était une montagne, elle dépasserait trois Mont-Blanc empilés.

Mais surtout, la charge de la dette, qui représente désormais 9,5% du budget selon la Banque de France, est devenue le premier poste de dépenses de l’État.

Pour être plus clair : avant même d’ouvrir un lit d’hôpital, de payer un professeur ou de financer un commissariat, l’État doit d’abord régler les intérêts d’une dette qui ne cesse d’enfler chaque année.

Chers collègues, la situation n’est pas seulement urgente : elle est critique.

Elle impose des choix courageux, pour ne pas hypothéquer l’avenir des générations futures.

Alors, vous allez sûrement me dire : « À qui la faute ? À Macron et aux gouvernements successifs ! »

Seulement voilà : cette dette n’est pas seulement le fruit d’une gabegie aveugle ou d’une gestion dispendieuse. Elle résulte aussi de crises exceptionnelles qui ont exigé des réponses exceptionnelles.

  • 140 milliards d’euros déployés sur trois ans pendant la pandémie du COVID pour le « quoi qu’il en coûte ». Une stratégie que certains ont raillé, alors qu’elle a permis d’éviter la faillite de 40 000 entreprises entre 2020 et 2022. Ce sont des emplois sauvés, des familles protégées et des vies sauvées.
  • C’est aussi 45 milliards d’euros de bouclier tarifaire après la crise énergétique pour éviter que des ménages ne choisissent entre se chauffer ou se nourrir. Pour éviter que que des PME ne ferment faute de pouvoir régler leur facture d’énergie.

Et ici, à la Métropole de Lyon, nous en avons bénéficié, de manière directe ou indirecte.

On vous entend d’ailleurs beaucoup moins lorsqu’il s’agit de reconnaitre que, lorsque les recettes des TCL se sont effondrées pendant la Covid, ce n’est pas la seule Métropole qui a absorbé le choc.

La Chambre régionale des comptes le dit très clairement : sans le soutien exceptionnel de l’État au SYTRAL, il aurait fallu soit tailler dans l’offre, soit augmenter fortement les tarifs. Autrement dit : faire payer la crise aux usagers.

Étrangement, cette solidarité-là ne trouve jamais grâce dans vos discours.

Elle n’entre jamais dans votre récit politique, sans doute parce qu’elle vous dédouane confortablement de vos propres responsabilités.

Monsieur le Président, je ne vous cache pas que votre Document d’orientations budgétaires, fut long à parcourir.

Entre les leçons de morales, le vernis rhétorique ou le rapport de force que vous voulez imposer à l’Amérique de Trump, il faut attendre la 20ème page pour parler du cas de la Métropole.

Et une chose saute aux yeux : depuis 5 ans, votre pilotage a cruellement manqué d’équilibre, tel un mauvais funambule.

Depuis 2020, vos résultats perlent d’eux-mêmes:

Entre 2019 et les projections 2025 : + 20 % de dépenses de fonctionnement, au-delà même de l’inflation.

Cette dérive provient notamment :

  • d’une hausse de 18 % des dépenses de personnel en quatre ans,
  • d’une augmentation de 22 % des subventions et participations, l’argent magique redistribué à tout-va.

Et en 2023, ce qui devait arriver arriva : un effet ciseau négatif.

Vous avez alors dû, ces deux dernières années, freiner brutalement, contraints par l’effondrement des recettes fiscales, notamment des DMTO.

Pourtant, dès le début du mandat, nous vous avions avertis, à plusieurs reprises, qu’avec cette gestion, nous risquions d’aller droit dans le mur.

Bingo !

Et comme vous n’aviez rien anticipé, vous avez dû opérer un freinage brutal, dont habitants et acteurs économiques en ont payé le prix fort :

  • hausse généralisée des impôts locaux : CFE, versement mobilité, TASCOM, DMTO,
  • Suppressions de postes à la Métropole : 90 CDD non remplacés, un départ à la retraite sur deux non compensé,
  • coupes dans les subventions aux évènements et acteurs du territoire.

La Métropole récole aujourd’hui les fruits amers d’une stratégie bien trop imprudente, où l’anticipation a fait défaut, au point de fragiliser grandement nos équilibres financiers.

Oui, la recentralisation de nos recettes fiscales réduit les marges, je vous l’accorde.

Oui, les ponctions d’un État malade compromettent lourdement nos capacités d’investissements, je le conçois.

Mais cette excuse ne justifie en rien une gestion qui a laissé trop longtemps filer nos dépenses.

Monsieur le Président, vous allez donc laisser une Métropole endettée à la même hauteur que vous l’aviez trouvé : d’environ 2 000 millions d’euros ( ou 2 milliards).

Mais surtout, vous allez laisser une capacité de désendettement qui est passée de 3 ans et 3 mois à 5 ans et 5 mois aujourd’hui.

Concrètement, cela signifie que notre capacité d’autofinancement, l’argent restant dans les caisses chaque année, et qui nous sert à investir au service du territoire, s’est dégradée. L’épargne brute a presque été divisée par deux : de 550 millions d’euros fin 2019 contre 300 millions fin 2025 selon vos propres chiffres.

Les habitants de la Métropole sont les premières victimes de votre gestion imprudente, où l’anticipation aura fait défaut.

Si certains vous qualifient aujourd’hui d’héritier de Gérard Collomb, ce n’est certainement pas le cas en matière de gestion financière.

Oui, le contexte est délétère, nul ne le nie.

Mais par négligence, vous avez gâché la situation financièrement saine dont vous aviez hérité à votre arrivée.

Et pour maintenir le bateau Métropole à flot, il y a désormais un prix à payer : celui d’emplois sacrifiés, celui d’un pouvoir d’achat amputé et de marges de manœuvres restreintes pour les acteurs économiques, qui font vivre notre Métropole.

C’est du factuel… car ce sont vos chiffres.

C’est votre bilan et il est sans appel.

Je vous remercie.

Intervention de Yves-Marie Uhlrich en Conseil de la métropole de lundi 17 novembre 2025. Délibération n°2025-3084.

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