Intervention de Nathalie Frier
Monsieur le Président et chers collègues,
Sur le volet social, notre Métropole est à la fois toute jeune et expérimentée. Toute jeune car, en effet, la structure à l’heure actuelle est née en 2015. Il y a eu un temps d’adaptation de mise en place mais elle est en même temps expérimentée car il y avait des actions qui ont été mises en place auparavant par le Département et qui ont été reprises et modernisées.
Les communes sont souvent les premiers acteurs de la solidarité et des actions de nos partenaires associatifs. Nous ne partions pas d’une feuille blanche mais l’histoire qui a été écrite dès 2014 a grandement modernisé les choses, me semble-t-il. Donc, le travail considérable mené par les élus et les équipes de la Métropole, initiés dès le début du mandat précédent sur le projet métropolitain des solidarités, a abouti à un document complet qui n’est pas une liste à la Prévert mais bien un vrai document d’orientation stratégique. Les axes qu’il développait sont les suivants. Il faut développer la prévention à destination de tous, offrir un parcours continu et adapté à l’usager, renforcer les partenariats pour gagner en cohérence et favoriser l’inclusion sociale et urbaine. Il rentre donc parfaitement dans les objectifs du plan pauvreté et il doit à mon sens continuer à les approfondir. Il reste grandement d’actualité.
Le plan de pauvreté, je le rappelle, est une initiative gouvernementale qui est décliné sur le territoire de la Métropole. Notre collectivité a un avantage, celle d’être dynamique, de bénéficier d’un contexte économique encore favorable et cela nous donne des moyens et cela nous donne aussi une responsabilité, celle d’agir pour ceux qui restent sur le bord du chemin de ce dynamisme, celle d’aller dans l’action et au-delà de l’affichage.
On ne va pas tirer un bilan ce matin du plan de pauvreté de la Métropole mais on peut d’ores et déjà évoquer un certain nombre d’éléments et d’actions qui avaient été mises en place depuis 2014 et tirer des enseignements pour l’avenir. Sur les enjeux, je parlerai d’une politique globale. L’exécutif précédent voulait allier l’humain à l’urbain. C’est le projet politique qui en était la base et c’est ce qui a inspiré son organisation. Œuvrez pour les solidarités et contre la pauvreté doit donc se baser sur cette idée que la solidarité n’appartient pas qu’au monde de l’action sociale et que chacun doit se l’approprier, notamment sur l’urbanisme qui doit prendre en compte cet élément.
La politique des attributions du logement doit donc être un outil. On ne peut pas continuer à paupériser des territoires qui sont déjà fragiles. Cela ne rend service ni aux personnes qui arrivent et qui ont besoin d’un accompagnement, que les équipes n’ont pas les moyens d’apporter, ni aux personnes qui sont déjà présentes. Une réelle mixité dans les communes et entre autres les communes de la Métropole.
C’est un enjeu qui dépasse les politiques sociales mais qui doit se retrouver dans toutes les politiques. On voit parfois que des programmes immobiliers privés et mal installés peuvent déstabiliser un quartier alors qu’il faut faire dans la dentelle, sinon les problématiques familiales s’installent, notamment dans les écoles, les rivalités se transposent même dans les cours de récréation. Nous devons donc avoir cette exigence envers les promoteurs de s’adapter à un territoire. Les bailleurs doivent aussi avoir ce souci. Je crois que la Métropole a un vrai regard sur ces questions et doit y faire attention. Monsieur le Président, il vous faudra avoir ce regard sur ces questions et y faire attention.
Je parlerai aussi du logement indigne où nous y serons très attentifs. La Métropole agit déjà sur ce domaine avec des dispositifs en lien avec l’État et les communes mais ce sont des situations très complexes et je crois qu’un renforcement des moyens métropolitains sur le sujet serait bienvenu. On manque de moyens humains, de solutions de relogement, les villes aussi.
Or, ce sont souvent des situations difficiles à repérer ou encore plus difficiles à dénouer mais une petite inattention sur un permis de construire peut déstabiliser tout un immeuble ou une rue avec l’installation de logements non conformes et, à terme, un quartier ou une école avec des enfants et des parents désemparés. Un parcours de vie, la pauvreté c’est un parcours de vie, elle concerne toutes les générations. Nous devrons avoir des réponses pour toutes les générations, pour ce qu’elles ont de spécifiques, la pauvreté du grand âge ce n’est pas l’enfance pauvre, une seule et même souffrance mais nous devons nous adapter et ne pas avoir une logique technocratique. Nous devons rester dans l’humain.
Lutter contre la pauvreté, c’est ouvrir les esprits, ouvrir les esprits de ceux qui ne veulent pas voir de leurs yeux et l’avoir à leurs côtés. C’est encore la question de la mixité. L’emploi plus facile à dire qu’à faire mais la lutte contre la pauvreté, c’est ramener de l’emploi pour les quartiers. L’action de la Métropole qui veut lier l’insertion et le développement économique prend une orientation tout à fait utile. Les politiques doivent contribuer à sortir de la pauvreté et pas entretenir cette pauvreté par des petits emplois qui n’avaient parfois comme insertion que le nom. Nous sommes tous Villes et Métropoles engagées sur la voie du développement durable avec de multiples actions.
Depuis 2014, la Métropole était très volontariste sur le développement durable, le plan climat, l’énergie, le schéma directeur des énergies, l’aide à la rénovation des logements mais avant toute chose pour que ces politiques réussissent, posons-nous cette question : comment convaincre des personnes de s’intéresser au développement durable de demain alors que leurs soucis quotidiens, c’est le repas du midi ?
Et quand le 10 du mois ou même avant, des personnes viennent au CCAS (Centre communal d’action sociale) ou à la Maison de la Métropole car elles n’ont plus rien pour se nourrir. Il nous faudra aussi améliorer la formation des bénévoles. De nombreuses associations travaillent avec abnégation et sérieux sur l’accompagnement des personnes en situation de fragilité sociale. Parfois, la bonne volonté ne suffit pas et je pense que l’amélioration de la formation des responsables et des bénévoles serait une bonne chose. Elle permettrait d’éviter les doublons d’actions car chacun connaîtrait mieux le fonctionnement des institutions, il y aurait donc une meilleure coordination.
On voit parfois des personnes s’improviser assistantes sociales sur des territoires fragiles avec des personnes en détresse. Il y a besoin de professionnels ou de personnes réellement formées. La Métropole pourrait jouer un rôle afin d’améliorer la formation des personnes. Lutter contre la pauvreté et ses conséquences, c’est un travail constant. Cela ne s’arrête pas et on le sait tous. On n’est pas moins pauvre à 22 heures qu’à 9 heures 30 le matin. On ne souffre pas moins du froid que du chaud. La Métropole s’est dotée d’une astreinte sociale claire et disponible et vu ses compétences qui sont très vastes, l’étendue du territoire, la diversité des problématiques, il n’est donc pas raisonnable de croire qu’un seul cadre d’astreinte pourra tout gérer surtout si ce n’est pas son domaine d’activité ordinaire. Les communes se trouvent souvent démunies face à des situations d’urgence, notamment sur l’hébergement. Je pourrais encore avoir une liste longue mais je vais conclure.
Donc, la lutte contre la pauvreté, c’est une politique globale, c’est une politique qui nécessite un investissement très fort de la Métropole, c’est une politique qui nécessite une coordination de l’ensemble des communes. La solidarité doit être partagée pour qu’au-delà des discours, chaque territoire prenne sa part d’un effort humain en direction des plus fragiles.
Je vous remercie.
Nathalie Frier
Commission permanente du 14 septembre 2020
Rapport n° CP-2020-0020 : Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté – Orientations et attributions des subventions au titre de l’année 2020Intervention de Nathalie Frier