« Aujourd’hui, il est clair que les valeurs portées par le Rassemblement national mèneront notre pays, mais aussi notre ville, dans une impasse.«
Monsieur le Maire,
Chers collègues,
Mesdames et Messieurs,
Comme beaucoup dans cet hémicycle, nous avons débuté notre engagement politique avec la lutte contre les extrêmes et notamment contre le Front National et le Rassemblement naitonal. Des marches, manifestes et rassemblements, nous en avons organisés, participé, et essayé de convaincre. Avec le temps, plus l’extrême-droite avance dans l’opinion, plus les semaines d’éducations contre le racisme diminuent sur l’espace public, plus la sensibilisation du grand public diminue. Une partie de nous-mêmes et des corps intermédiaires ont abandonné.
Aujourd’hui, il est clair que les valeurs portées par le Rassemblement national mèneront notre pays, mais aussi notre ville, dans une impasse.
Une impasse sur les politiques de logement : l’accès aux logements sociaux est sous condition de revenus et dépend de la taille du ménage. Il ne relève aucunement de l’origine des demandeurs.
Pour l’extrême-droite, les minima sociaux et les aides publiques pourraient être conditionnés afin de contrôler la vie des personnes en situation de précarité.
C’est bien simple, dans le programme du RN, pas un mot sur le chômage, pas un mot sur le retour à l’emploi des bénéficiaires du RSA, pas un mot sur les demandeurs d’emploi de longue durée ou sur les jeunes qui arrivent sans diplôme ou formation.
Nous sommes inquiets pour l’avenir de notre mission locale, car nous savons que chaque jeune est accompagné vers l’emploi, qui reste la meilleure garantie d’émancipation.
Cette élection n’est pas qu’une élection nationale, elle a forcément un impact sur notre collectivité.
Non pas uniquement en terme de relations sociales, de baisses des investissements pour les collectivités, mais aussi les grandes promesses non chiffrées qui seront des charges nettes pour la ville :
– par exemple pour ce qui concerne le plan d’ouvertures de crèches avec les 6 milliards engagés déjà par l’Etat et qui serait mise en cause, cela pourrait devenir une charge nette demain pour la ville ;
– les aides de la CAF pour le si contesté dispositif PEPS du périscolaire ;
– les charges supplémentaires et nouvelles qui reviendraient à renouveler le plan d’urgence pour les MJC et Centres sociaux déjà approuvé ;
– l’arrêt des réseaux d’éducations prioritaires et des cités éducatives ;
– des dotations de l’Etat modifiées qui vous amèneront forcément à revoir votre PPI.
La liste est longue et nous la connaissons tous. L’extrême-droite est l’ennemi également de la cause des femmes. Elle soutient Vladimir Poutine. Elle se révèle incompatible avec une transition écologique juste, tout comme elle souhaite priver les entreprises françaises d’opportunités de développement économique.
La liste est longue et ici peu sont à convaincre. Comme l’avait affirmé Edgar Morin, le grand remplacement est celui des idées humanistes et émancipatrices par des idées supremacistes et xénophobes.
Alors les formations politiques sont actuellement en pleine phase de recomposition. Beaucoup de nos citoyens sont perdus, peut-être même orphelins dans cette situation. Certains aimeraient eux aussi manifester et crier leur détresse, leur envie de sursaut face au RN.
Nous ne sommes plus dans l’esprit de 2002 où c’est la République qui a fait barrage. Comment peut-on manifester le dimanche, officiellement contre l’extrême-droite, et être absent le mardi contre l’antisémitisme ?
Des digues ont sauté. La société, notre ville, a besoin de repères, de savoir. Il ne s’agit pas d’une élection uniquement bilan contre bilan, perspectives et programmes. Il s’agit de défendre la République
Ces repères, nous ne pouvons les avoir uniquement le temps d’une période électorale, avec une dissolution qui aura aussi dissout votre projet de révision du droit de grève au sein de la direction de l’éducation.
Compte-tenu de la nature des débats avec les organisations syndicales, beaucoup retiendront que l’intention est aussi grave que l’action.
Il en est de même du climat social à la bibliothèque municipale de Lyon qui nous inquiète, avec en filigrane une promesse d’ouvertures élargies que vous pourriez ne pas tenir. Aujourd’hui, les organisations syndicales vous demandent d’appliquer localement les engagements que vous avez pris nationalement.
La crédibilité de la parole, au risque de décevoir et de renvoyer vers les extrêmes, passe aussi par là.
La lutte contre les extrêmes, cela passe surtout par la nécessité d’arrêter cette partie de bowling permanente, où si quelque chose ne va pas, c’est de la faute, un jour de l’Etat, un autre de la Région, ou encore de vos prédécesseurs.
Notre prochain conseil municipal se déroulera en septembre. D’ici-là, outre le contexte national, notre ville accueillera notamment les épreuves des jeux olympiques et la flamme paralympique. Nous souhaitons que notre ville soit à la hauteur de ces différents temps, qu’elle se montre comme une cité rayonnante, attractive et tolérante dans cette occasion de faire briller notre art de vivre, notre patrimoine, notre culture et, bien entendu, notre tissu sportif. Nous adressons tout notre soutien aux agents municipaux, forces de l’ordres, personnels publics et privés mobilisés lors de ces évènements.
Nous nous retrouverons également autour des commémorations relatives aux 80 ans de la libération de notre ville, auxquels répondent d’autres temps de mémoire. Je pense notamment à Jean ZAY qui a laissé une œuvre réformatrice immense, en posant les bases de vastes politiques d’éducation populaire et sportive, mais aussi des CROUS, du CNRS, des CEMEA ou même du Festival de Cannes, créé avec la volonté de faire émerger un véritable festival international indépendant, à une époque où la Mostra de Venise était devenue la chambre d’écho du fascisme mussolinien.
Au Panthéon, sur sa dépouille, sa vision résonne en nous, en écho de l’actualité, dans les consciences de tous les républicains sincères, de ceux qui croient dans la promesse de progrès et d’émancipation des Lumières.
Je vous remercie.
Introduction prononcée par Charles-Franck LEVY lors du conseil municipal du 27 juin 2024.