Intervention de Louis Pelaez
Monsieur le Président,
Je voudrais rendre ici hommage à tout le travail réalisé par Jean-Charles FODDIS à la tête de l’ADERLY, et qui nous a quittés prématurément.
Il y a un an, votre majorité a fait le choix de diminuer de 5 % la subvention attribuée à l’ADERLY. Il s’agissait d’un très mauvais signal envoyé aux acteurs économiques.
Vous aviez alors indiqué pour rassurer que cette baisse était temporaire, expliquant qu’elle était liée à une baisse des déplacements de l’agence en 2020 suite au contexte Covid. Les différents comptes rendus de séance en font foi.
2022 est arrivée et ce qui était annoncé comme temporaire s’avère être permanent.
Nous n’oublions pas non plus que le versement de la seconde partie de la subvention de la Métropole n’était pas garanti, mais conditionné aux résultats d’un audit de la structure. Cet audit, nous vous l’avons demandé ; vous nous l’avez promis en commission ; mais une fois encore, nous n’avons rien reçu.
Il y a un véritable problème dans la non-communication des informations demandées par les élus. De vraies difficultés à respecter le droit à l’information des élus prévus par la loi et conforté dans notre règlement intérieur. C’est quasi systématique. Est-ce qu’il va falloir qu’on en vienne à saisir la CADA à chaque fois ?
Où est la transparence promise ? Je veux bien entendre qu’il ne s’agit pas de mettre les services sous pression. Mais ici, il s’agissait d’envoyer un simple mail avec le rapport en pièce jointe.
Alors, quoi qu’il en soit, il semblerait que vous ayez été satisfait par les conclusions de cet audit : le budget de la structure reste stable cette année.
Mais ne pensons pas pour autant que l’ADERLY est sauvée. Vous l’avez-vous-même reconnu : le Covid et le décès brutal de Jean-Charles FODDIS ne vous ont pas permis d’aller au terme de votre travail et au bout de vos ambitions pour cette année.
Nous attendons toujours vos conclusions sur la gouvernance de la structure que vous aviez âprement critiquée l’an dernier. Vous estimiez en effet que la Métropole ne pesait pas assez dans la prise de décisions, eu égard à la portée de son financement.
Lorsqu’on regarde en détail la délibération, l’impression demeure que la structure est toujours sous surveillance. Dans ce contexte, il est difficile de croire à vos éléments de langage sur le temps nécessaire pour se connaître et la confiance qui se serait installée depuis. L’idée toujours d’une partition à deux voix où chacun poursuit son propre but.
Alors, vous avez présenté votre nouvelle feuille de route pour l’ADERLY que l’on pourrait résumer simplement en : « accueillir moins, mais mieux. »
En 2021, l’ADERLY a ainsi accompagné près de 62 entreprises, soit le plus faible nombre d’implantations depuis 2013. Et cela n’est pas dû qu’à la crise sanitaire.
Même sans elle, vous assumez une baisse de voilure qui vous aurait amené autour de 80 implantations, ce qui reste bien en deçà des années précédentes.
J’anticipe déjà la critique : vous allez nous répondre que cela s’explique aussi par la difficulté à trouver du foncier à destination des entreprises.
Alors, je vous réponds par avance que le PLU-H de 2019 s’assurait du maintien de réserves foncières avec 6 880 hectares classés en zone économique dont 1 760 ha consacrés à la production, l’artisanat et l’industrie.
Et que c’est cette majorité, avec la modification n° 3 du PLU-H, qui prévoit de rétrozoner 750 ha en zones naturelles, dont une bonne partie liée aux extensions de l’activité économique à long terme.
Pour 2022, vous fixez une feuille de route précise :
- 60 entreprises implantées,
- 40 % des projets implantés avec un ou plusieurs impacts,
- 10 projets ESS accompagnés,
- 15 % des projets implantés hors Métropole,
Il ne s’agit désormais plus d’accompagner toutes les entreprises qui souhaitent s’implanter sur le territoire. Il faut désormais montrer patte verte pour avoir le droit d’être accompagné.
Et il ne s’agit pas simplement de prioriser les implantations dans certains secteurs clés, ce qui peut se comprendre, mais bien de mettre des barrières à l’entrée.
Comment alors choisir les entreprises que vous estimez dignes de s’implanter dans la Métropole ?
Vous vous êtes dotés d’un outil pour calculer l’impact de chaque nouvelle implantation d’entreprises au regard d’un certain nombre de critères dont :
- Le rapport entre le foncier nécessaire et le nombre d’emplois créés,
- Les retombées en matière d’achats des entreprises sur le territoire,
- Leur faible empreinte carbone.
Cet outil a été élaboré en lien avec la start-up Gén’éthic. Il s’agit, je cite : « d’évaluer la typologie d’investisseurs derrière le projet, de façon à privilégier les porteurs de projets vertueux, s’inscrivant de façon globale et avérée dans des démarches sociales et environnementales. »
On comprend mieux la présence de certains élus à des manifestations pour demander le départ d’entreprises qu’ils estiment non vertueuses. Les salariés apprécieront.
Demain, un grand groupe comme Boehringer Ingelheim avec ses 700 salariés sur site, pourra-t-il toujours se développer à Lyon ?
Cette démarche et cet outil, nous avons déjà eu l’occasion d’en parler lors du SPAR concernant les achats publics de la Métropole et du Total Impact Score, dont tout laisse penser qu’il deviendra obligatoire pour les entreprises souhaitant obtenir des marchés publics.
Les choses sont déjà très claires pour l’ADERLY. Je cite : « Sur 2022, l’Agence définira des seuils minimaux sur la base des résultats des projets sur la grille de notation, en deçà desquels le projet pourrait ne pas être accompagné par l’Aderly. »
Alors, on en est là. C’est à notre sens une terrible erreur, car en ne vous consacrant qu’aux secteurs économiques qui vous intéressent, vous prenez le risque de passer à côté des prochaines pépites, que d’autres agglomérations auront moins de scrupules à accueillir.
Et les cycles économiques sont fortement liés aux signaux envoyés. Ce n’est pas parce que nous vous avons laissé une agglomération économiquement dynamique qu’il faut se reposer sur ses acquis.
D’autant plus que le bilan économique et environnemental de l’ADERLY est reconnu par tous. Les résultats de l’étude du cabinet de conseil en stratégie de développement durable Utopies sont éloquents.
569 entreprises sont encore en activité sur les 884 qui se sont implantées sur le territoire grâce à l’ADERLY ces 10 dernières années, ce qui représente près de 10 400 emplois directs soit près de 8 % des créations nettes d’emplois de l’Aire métropolitaine de Lyon Saint-Étienne.
L’économie de proximité et les circuits courts ont fortement gagné dans cette dynamique d’implantation d’entreprises avec une croissance du volume des achats réalisés localement de + 38 %.
Sur le plan environnemental, avec les relocalisations d’activités, on estime que les actions de l’ADERLY depuis 10 ans ont permis d’éviter l’émission de 70 kilotonnes de CO2 !
Alors, ne cassez pas tout ça en ayant une vision fermée, restrictive et sinistre.
Mais il est vrai que vous ne voyez Lyon que comme un chef-lieu de département et pas une capitale économique européenne.
Pour vous, l’attractivité est un gros mot. Votre diagnostic exprime noir sur blanc en annexe que nous sommes « une ville pas très sexy ni moderne », « associée à une forme d’arrogance ».
Votre note d’intention est claire : « positionner Lyon comme la métropole la plus recommandée par ceux qui la vivent et qui l’animent », un nouveau « modèle à la lyonnaise » en quelque sorte que vous comptez présenter au MIPIM.
Si votre modèle est celui que l’on constate depuis deux ans avec hausse de l’insécurité, d’une ville sale et inaccueillante et des quartiers saccagés. Alors, soyez assurés que vous serez bien recommandés.
Je vous remercie
Louis Pelaez
Conseil Métropolitain des 14 et 15 mars 2022
Rapport nº2022-1007 – développement économique, numérique, insertion et emploi – Association pour le développement économique de la région lyonnaise (ADERLY) – Attribution d’une subvention de fonctionnement pour son programme d’actions 2022
Intervention de Louis PELAEZ