Monsieur le Président,

Mes chers collègues,

L’arrêt du compte financier unique de la Métropole et de ses budgets annexes représente un moment particulier dans la vie d’une collectivité territoriale. Plus précisément, il témoigne des choix politiques d’une gouvernance, des actions qui ont été menées ainsi que du bilan comptable vis-à-vis des priorités que l’on se donne en début de chaque année.

La présentation du Compte Financier Unique 2023 est d’autant plus importante qu’elle intervient dans un contexte national particulier.

Le déficit public de l’État pour 2023 s’est finalement élevé à 5,5 % du produit intérieur brut (PIB), soit 154 milliards d’euros selon les données publiées le 26 mars dernier par l’Insee. Un chiffre très supérieur aux 4,9 % inscrits par Bercy dans la loi de finances pour 2024. La dette publique s’est, quant à elle, établie à 110,6 % du PIB.

Le rythme du redressement des comptes publics demeure plus lent en France qu’ailleurs en Europe.

Ce contexte économique, social et financier n’augure rien de bon pour nous, collectivités locales, dernier maillon de la chaîne politico-économique.

De plus, nos collectivités sont encore trop souvent stigmatisées ou présentées à tort comme trop dépensières.

Ceux qui tiennent ce genre propos oublient trop souvent que c’est ici, au plus près du citoyen, que le lien social et le développement territorial et économique se créent. Cela fait maintenant quelques années que le désengagement de l’État nous oblige à gérer la pénurie et à miser sur nos propres forces.

Seulement, à la lecture des principaux indicateurs des comptes financiers uniques, la situation de la Métropole ne s’explique pas uniquement par des causes exogènes.

Alors que la situation est connue de tous, depuis le début de votre arrivée aux responsabilités, vous continuez votre marche effrénée et irresponsable en augmentant nos dépenses de fonctionnement. À en croire le CFU 2023, les dépenses de fonctionnement s’élèvent donc à 2845 millions, en constante augmentation depuis 2019 où nous étions, pour mémoire, à 2367 millions d’euros en dépenses de fonctionnement, soit une augmentation de 20 %.

Pour la seule année 2023, c’est une augmentation de 110,5 millions d’euros comparés à l’année 2022.

Quelle collectivité, au regard des difficultés actuelles à mobiliser des recettes compensatoires, peut se permettre de continuer à engager de telles dépenses ?

Pourtant, vous connaissez tout autant que nous la situation du marché immobilier, le gel des dotations de l’État et donc, plus globalement, le recul de la grande majorité de nos recettes fiscales.

Le budget primitif 2023 prévoyait notamment des recettes liées aux DMTO de 420 millions d’euros, ça sera finalement 314 millions en 2023, une nouvelle chute de 27,8 % par rapport à 2022.

Forcément, avec des prévisions faussées et supérieures à la réalité, cela fait un trou dans la caisse.

Plus inquiétant encore, et c’est là où vous vous prenez les pieds dans le tapis, votre gestion déraisonnable des dépenses de personnel depuis le début du mandat entraîne notre Métropole dans la zone rouge.

Pourtant, notre groupe vous avait déjà averti au sujet de votre politique de recrutement démesurée, qui manque de réflexion avisée, notamment en ce qui concerne la concentration des efforts sur les nouveaux équipements ou le renforcement des services techniques.

À votre arrivée aux responsabilités, vous avez également sciemment morcelé les services de la Métropole, ce qui a conduit à une multiplication des postes et à une communication difficile entre les différents services.

Vous vous retrouvez maintenant dans une impasse, au pied du mur et vous en faites déjà payer le prix fort aux agents de notre Métropole.

Certains doivent enchaîner des contrats à durée limitée qui ne sont à terme pas reconduits, puisque que vous réalisez enfin qu’il va falloir se serrer la ceinture et arrêter de continuer à épuiser nos ressources financières.

Vous portez la responsabilité de l’annonce de ne pas renouveler les contrats de 206 agents à l’été. Cette décision est la conséquence directe d’un manque de prévoyance, vous obligeant aujourd’hui à sacrifier une partie du personnel de la Métropole.

Par ailleurs, à ce sujet, vous nous donnez des chiffres différents.

La synthèse du CFU 2022 nous parle de 480 millions d’euros en dépenses de charges de personnel quand le tableau du CFU 2023 joint à cette délibération parle de 416 millions d’euros pour le CFU 2022. Quel chiffre doit-on croire ? Peut-être que pour vous, 64 millions de différence ce n’est pas si grave après tout. Cela en dit long sur la rigueur dont vous faites preuve dans la gestion de nos comptes publics.

Vous vous rendez compte très concrètement qu’une gestion irresponsable de nos comptes publics peut avoir des conséquences très graves et très concrètes pour nos concitoyens ainsi qu’au bon fonctionnement de la Métropole.

Monsieur le Président, vous avez cru que vous étiez en capacité de faire fi de certains aspects, en vous vantant d’engager des budgets sans précédent avec une certaine arrogance. Aujourd’hui, vous subissez de plein fouet votre manque d’humilité.

En tout cas, le poste de dépenses des ressources humaines est très claire et nous montre que les crédits alloués représentent en 2023 510,6 millions d’euros dont 504,4 millions dédiée à la masse salariale. Une augmentation de 5,6 % avec une hausse de 26,8 millions d’euros par rapport à 2022. Cette augmentation s’ajoute à celle de 5% entre 2021 et 2022. Si je veux être plus clair, en 2 ans, les crédits alloués aux ressources humaines ont augmenté de 49,8 millions d’euros.

Sentant le loup venir, vous justifiez ces hausses successives par, je cite : « la poursuite du plan de recrutement ambitieux pour répondre à la feuille de route de l’Exécutif ».

Si vous me le permettez, J’aurais deux remarques à ce sujet :

Premièrement, si pour vous la conception de gestion des ressources humaines s’apparente à multiplier les CDD de chargé de mission, pour une fois la tâche finie, s’en débarrasser, rien ne sert de prétendre à poursuivre une politique de recrutement ambitieuse.

Alors Monsieur le Vice-Président Artigny nous a rassurés en Commission Finances en affirmant qu’il n’y avait pas de suppression de postes au sein de notre Métropole, nous voilà rassurés. En revanche, je me demande si vous n’avez pas pour habitude de maintenir de nombreux agents dans des situations professionnels précaires. Votre nouveau front populaire doit par ailleurs s’en retrouver bien attristé !

Deuxièmement, et je suis sûr que vous me voyez venir Monsieur le Président, parlons des investissements engagés par la Métropole sous votre mandat.

En 2023, la Métropole investit 193 millions d’euros de moins qu’en 2018, année de référence hors Covid. Nous avons donc ici la preuve, noir sur blanc, que, malgré la légende que vous aimez entretenir, vous n’avez pas réussi à engager de grands projets révolutionnaires au service de tous les Grands Lyonnais.

Déjà en 2022, les prévisions du budget primitif étaient bien supérieures à la réalisation effective sur notre territoire, avec 963 millions d’euros de dépenses d’investissement inscrites au budget, mais seulement 747 millions dépensés.

Loin de vous décourager, vous vous êtes dit que pour l’année 2023 ce n’était pas suffisant, et vous aviez tablé sur pas moins de 1015,4 millions d’euros en dépenses d’investissements.

Malheureusement, sans surprise, vous êtes resté une nouvelle fois le bec dans l’eau, en investissant 778,9 millions, soit un peu plus de la moitié des crédits prévisionnels alloués. Vous qui reprochiez à la majorité qui vous a précédé de manquer d’ambition et qui aviez promis d’innover et d’investir concrètement sur l’agglomération, vos mesures ne sont clairement pas à la hauteur des belles promesses !

Enfin, Monsieur le Président, permettez-moi de finir en parlant spécifiquement de l’évolution de la dette. On vous a vu, ces derniers temps, annoncer que, miracle, la dette de la Métropole n’avait jamais été aussi basse depuis la création de la Métropole de Lyon. Factuellement, oui, c’est vrai.

Laissez-moi simplement vous rappeler qu’en 2016, la Métropole de Lyon a dû absorber la dette toxique du Département du Rhône.

Pourtant, le bilan de 2023 montre une capacité de désendettement de la Métropole qui a grimpé à 5 ans et 7 mois, là où en 2022 elle était à 2 ans et 8 mois et en 2019 de 3 ans et 3 mois !

De facto, notre capacité d’autofinancement a décru de manière vertigineuse en un an passant de 540,2 millions d’euros à 262,7 millions. Un effondrement de plus de 63 %, qui va compromettre fortement votre crédibilité pour emprunter, d’autant plus que la note de la France a été dégradée.

À plus long terme, la capacité à assurer financièrement vos engagements et à poursuivre les investissements sur la Métropole lyonnaise pourrait être grandement compromise.

Monsieur le Président, tout le monde ici est conscient que la centralisation des dotations fiscales par l’État, ainsi que la conjoncture économique difficile, notamment du marché de l’immobilier, indépendamment de votre seul fait, participent à la forte dégradation de la situation budgétaire de notre Métropole.

Cependant, et dès à présent, il va falloir que collectivement, nous réfléchissions à des mesures palliatives et structurées, notamment au sujet de nos dépenses de fonctionnement, pour que le modèle financier de la Métropole, aussi robuste soit-il, ne se retrouve pas un jour, dans une situation inextricable.

Je vous remercie.

Intervention d’Yves-Marie Uhlrich en Conseil de la Métropole du 24 juin 2024, N°2322.

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